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Taxonomie verte européenne : définition, objectifs, applications en entreprise

  • Temps de lecture: 4 - 5 min
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Pour promouvoir la finance durable et le reporting extra-financier, l’Union européenne (UE) a lancé en 2018 la taxonomie verte. Classant les activités selon leur seuil d'émissions de CO2, ce règlement comporte de nombreux enjeux pour les organisations en Europe. Faisons le point.

En Europe, l’accélération de la transition vers une économie et une finance plus durable est pleinement à l’ordre du jour. Conformément aux Accords de Paris sur le climat, le Pacte vert européen (Green Deal) a fixé comme objectif à l'UE d’atteindre la neutralité carbone en 2050. De son côté, le paquet « Fit for 55 » ambitionne de réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) de l’UE de 55 % dès 2030. Pour porter ces aspirations environnementales, la taxonomie verte européenne s’impose comme l’un des leviers principaux. Mais comment la taxonomie verte peut-elle être définie ? Qui est concerné ? Et quels sont les enjeux pour les entreprises et les acteurs financiers du Vieux Continent ?

Qu’est-ce que la taxonomie verte européenne ?

Lancée par la Commission européenne en 2018, la taxonomie verte est un règlement qui établit une classification des activités économiques selon leur caractère « durable sur le plan environnemental ». 

Trois types de catégories d’activités sont ainsi prises en considération dans la taxonomie verte européenne : 

  • les activités contribuant directement à l’atténuation du changement climatique, la prévention et le contrôle de la pollution, la préservation de la biodiversité, etc. ; 
  • les activités dites "habilitantes", qui permettent à d’autres entreprises du secteur durable de se développer et de contribuer positivement à la sauvegarde de l’environnement ;
  • les activités dites "transitoires" qui permettent de baisser l’incidence environnementale dans des secteurs où les alternatives sont inexistantes.

Son objectif est simple : être la véritable “boussole environnementale” de l’UE, afin d’identifier les activités les plus vertueuses et mobiliser les investissements privés vers ces dernières, c’est-à-dire par l’établissement d’un écosystème de finance durable. Le but final étant d’atteindre la neutralité climatique d’ici à 2050, tel que le prévoit le Pacte Vert pour l’Europe (Green Deal).

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Qui est concerné par le règlement de la taxonomie de l'UE ?

Trois catégories majeures d'acteurs sont concernés par la taxonomie verte européenne : 

  • Les entreprises déjà soumises à la publication d’une Déclaration de Performance Extra-Financière (DPEF) doivent y intégrer des indicateurs de durabilité de taxonomie verte (article 8 du règlement 2020, complété et précisé par un règlement délégué en juillet 2021). Avec l’entrée en application de la Directive CSRD le 1er janvier 2024, l’obligation de publications extra-financières est élargie : 50 000 sociétés supplémentaires devront y répondre, contre 11 000 grandes entreprises jusqu’à présent 
  • Les acteurs financiers, à savoir les banques et fonds d’investissements, les institutions de supervision financière (banques centrales, par exemple) ainsi que les compagnies d'assurances
  • L’Union européenne et les États membres, afin d’établir des mesures publiques, des normes ou des labels relatifs aux produits financiers verts ou aux obligations vertes.

Comment appliquer la taxonomie verte en 3 étapes dans votre entreprise ?

Étape 1 : vérifier l’éligibilité de ses activités vis-à-vis de la taxonomie verte

La classification de la taxonomie verte couvre une liste de 100 activités économiques éligibles en Union européenne. Le premier pas vers la mise en œuvre de ce règlement à l’échelle de votre entreprise consiste donc à réaliser une analyse d’éligibilité. Obligatoire depuis 2022, cet audit repose sur la vérification du poids, en pourcentage du chiffre d’affaires, des dépenses d’investissement (CAPEX) ainsi que des dépenses d’exploitation (OPEX) de vos activités incluses dans la taxonomie, par rapport aux activités globales de votre organisation et aux investissements.

Il est intéressant de souligner qu’une récente étude, menée en octobre 2023 par l’Autorité européenne des marchés financiers (AEMF) sur les pratiques de reporting de 54 entreprises, a calculé un taux d’alignement moyen de leur chiffre d’affaires - c’est-à-dire la proportion des activités économiques d’une société en phase avec les critères et les seuils de la taxonomie européenne - de l’ordre de 17,3%. Ainsi, moins de 20% des activités globales des entreprises sont du ressort de la taxonomie.

À noter, par ailleurs, que le gaz et le nucléaire, producteurs d'électricité, sont des activités éligibles à la taxonomie verte depuis le 1er janvier 2023. 

Étape 2 : contribuer à au moins un des 6 objectifs environnementaux de la taxonomie…

Pour qu’une activité puisse bénéficier du label “vert” au sens de la taxonomie, elle doit contribuer de manière substantielle à au moins un des 6 objectifs identifiés par la taxonomie verte

  • l’atténuation du changement climatique ;
  • l’adaptation au changement climatique ;
  • l’utilisation durable et la protection des ressources aquatiques et maritimes ;
  • la transition vers une économie circulaire ;
  • la prévention et le contrôle de la pollution ;
  • la protection et la restauration de la biodiversité et des écosystèmes. 

Copyright : Finance durable : bien comprendre la Taxonomie et le règlement SFDR pour exprimer vos préférences, AMF, Octobre 2022

Étape 3 : …sans porter atteinte aux autres objectifs de la taxonomie européenne 

Répondre à au moins un des 6 objectifs climatiques et environnementaux ne suffit cependant pas pour être aligné avec la taxonomie. Il est également nécessaire de respecter le principe du « Do no significant harm » (« absence de préjudice important »). Cela signifie que votre entreprise ne doit pas causer de préjudice significatif aux autres objectifs sur l’ensemble du cycle de vie de vos produits et services.

Deux autres critères s’ajoutent à ces deux premières conditions pour que votre activité soit considérée comme verte au sens de la taxonomie : 

  • respecter les normes minimales en matière sociale et de gouvernance, telles que les droits de l’Homme, les conventions de l’Organisation internationale du Travail, les droits sociaux et du travail, etc.
  • consolider les données, justifiant de la contribution substantielle de vos activités à au moins un des objectifs climatiques et environnementaux, sans causer de préjudice aux autres objectifs, tout en respectant les normes minimales suscitées, dans un rapport extra-financier.

Pourquoi s’aligner sur la taxonomie verte ? 

Pour répondre à cette question, on peut avancer de nombreux avantages pour les entreprises et les investisseurs en Europe. 

Tout d’abord, cette classification permet de disposer d’un langage commun de la durabilité, qui  apporte en outre une structure théorique pour transformer votre entreprise et orienter vos efforts en la matière. 
Elle vous garantit ainsi de pouvoir afficher un plan de transition chiffré et rythmé dans le temps en vue d'obtenir du CA "vert". C'est exactement ce que recherchent les investisseurs par exemple. Ainsi, dans le cadre d’une levée de fonds, vous développez votre capacité à capter les investissements verts.

D’autre part, la taxonomie verte européenne examine la durabilité d'une activité de manière systémique. Cela vous permet donc de prouver l’engagement de votre organisation vers la  diminution de son impact global, et non plus simplement sur l'aspect changement climatique. 

Enfin, ce référentiel clair et partagé crédibilise vos efforts pour diminuer votre impact et les rend plus réalistes. Vous prémunissez ainsi votre société de tout greenwashing involontaire.

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Les acteurs financiers et les investisseurs pourront, quant à eux, se référer à un système de classification partagé par tous et pour tous les investissements. La taxonomie permet donc de mieux envisager les risques et les opportunités de ses portefeuilles d’investissements et de garantir sa réputation, en évitant de subventionner des activités contraires aux objectifs environnementaux. In fine, elle participe à une meilleure définition de leur volonté d’investissement. 

Enfin, entreprises et acteurs du monde financier peuvent partager, grâce à cette réglementation, un langage commun, tout en participant à l’atteinte des objectifs fixés par les Accords de Paris.

 

Article relu et validé par Eric Beyma, Expert référent climat, Bpifrance

 

SOURCES
Règlement (UE) 2020/852 du Parlement européen et du Conseil du 18 juin 2020 sur l’établissement d’un cadre visant à favoriser les investissements durables et modifiant le règlement (UE) 2019/2088 – Parlement Européen
Le premier acte délégué de la Commission, sur le volet climatique de la taxonomie européenne 
Le rapport du groupe d’experts sur la finance durable, mars 2020 (uniquement en anglais) 
Communiqué de presse de la Commission européenne, du 1er janvier 2022 
Acte délégué relatif au volet climatique de la taxonomie et amendements aux actes délégués sur les obligations fiduciaires, les conseils en investissement et en assurance – Commission européenne
Étude sur le reporting taxonomie des sociétés cotées non financières – AEMF 
Neutralité carbone : la taxonomie européenne en six questions | vie-publique.fr
Taxonomie verte : mode d’emploi ! - Commission européenne (europa.eu)