Quelles retombées économiques avec le Green Deal Européen ?

Etabli par la Commission Européenne, le Pacte vert pour l’Europe (European Green Deal) vise à mobiliser les 27 membres de l’UE dans la réduction de leurs émissions carbone. Big média a rencontré Thomas Launay, chargé de projet au sein de la Direction Développement Durable de Bpifrance, pour comprendre en quoi ce dispositif pourrait transformer durablement l’économie du Vieux Continent.

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European Green Deal bpifrance

« Pouvons-nous, êtres humains, continuer à vivre bien et en toute sécurité sur cette planète ? », questionnait la Présidente de la Commission Européenne, Ursula von der Leyen dans une tribune au Monde en 2019. Une interrogation légitime selon l’Agence européenne de l’environnement (AEE), au regard des événements climatiques extrêmes survenus ces dernières années, accentués par le réchauffement de la planète. Incendies, inondations, canicules… Les conséquences de ces phénomènes toujours plus nombreux et intenses poussent les dirigeants du monde entier à adopter des stratégies préventives pour limiter l’augmentation de la température de l’atmosphère sous les 2°C à horizon 2100. Une volonté aussi à l’origine de la création du Pacte vert pour l’Europe en 2019, par la Présidente de la Commission Européenne.  

Green Deal Européen, de quoi parle-t-on ? 

« L’Union Européenne a décidé de faire de l’Europe le premier continent bas carbone, neutre à l'an 2050 », déclare Thomas Launay, chef de projet développement durable au sein de la Direction du même nom chez Bpifrance. Pour respecter les Accords de Paris de 2015 et rester sous le seuil des deux degrés de réchauffement planétaire d’ici la fin du siècle, le Vieux Continent met en place une stratégie de finance durable ambitieuse, le Green Deal. Ce pacte vise effectivement à soutenir la transition énergétique et écologique (TEE) via les objectifs climatiques et économiques de l’Europe. Sa première grande échéance ? Avoir réduit les émissions de gaz à effet de serre (GES) européennes de 55% d’ici 2030 (Fit for 55). 

« Les actions concrètes passeront par du financement, estime l’expert de la banque publique. Il faudrait concrètement investir 350 milliards d’euros par an pour assurer la transition climatique, et plus de 140 milliards pour les objectifs environnementaux ». Agroalimentaire, industrie ou encore BTP, la majorité des secteurs d’activités sont concernés sur des thématiques comme l’énergie, la biodiversité ou encore la mobilité. Les investissements réalisés dans le cadre de ce pacte s’appuient sur les grands principes de finance durable : davantage de transparence de la part des investisseurs et entreprises, et hausse de la prise en compte des critères ESG (environnementaux, sociaux, et de gouvernance) dans les transactions. « Avec les menaces climatiques qui pèsent sur le continent et les risques de financement d’assurance associés, il est nécessaire de réfléchir à l’échelle européenne », détaille Thomas Launay. Un enjeu de taille, qui mobilise forcément les entreprises occidentales. 

L’impact des directives du Green Deal européen sur les entreprises 

Avec la mise en place d’un tel dispositif – impliquant de nombreux changements structurels, et de long terme sur les plus grands marchés financiers –, les sociétés européennes sont nécessairement concernées. Le Green Deal prévoit en effet la mise en place de directives à destination de ses 27 Etats membres. Le chef de projet Développement Durable explique : « il s’agit d’une ligne de conduite vers laquelle tendre. Chaque pays a 18 mois pour transcrire en loi nationale les nouvelles directives européennes et les faire appliquer ».  

La CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive), qui entrera en vigueur dès janvier 2024, en est un parfait exemple. Elle prévoit de nouvelles obligations de reporting de durabilité, plus exigeantes, de la part des entreprises. La publication de rapports extra-financiers (DPEF) jusqu’alors obligatoire pour les sociétés cotées, s’étendra progressivement à des structures plus petites (250 salariés) à partir de 2025. « Déclarer publiquement ses émissions de carbone annuelles pousse davantage les entreprises à se questionner sur leur impact environnemental », commente Thomas Launay. A termes, la CSRD tend à amener les rapports de durabilité sur un pied d’égalité avec les rapports financiers. Un but louable, « mais pas complètement suffisant », pour l’expert. 

Aller plus loin avec l’European Green Deal 

Pour l’instant centré sur le partage de données financières ou de durabilité (ESG), le Pacte vert européen, par le biais de l’application de règlement ou de directives comme la CSRD, « ne prévoit d’amende qu’en cas d’absence de déclaration ». Des mesures « qui pourraient être plus engageantes », selon le chef de projet Bpifrance. Avec une première échéance de réduction des émissions de GES fixée à 2030, il est grand temps d’agir ! Or, les seules obligations de déclaration et de transparence en matière de financement n’ont pour l’heure pas engendré de baisse significative du carbone émis sur le Vieux Continent. « Finalement, le Green Deal, c’est la création d'un environnement économique propice à la mise en place d’une stratégie bas carbone », résume Thomas Launay. Des obligations de résultats liées aux performances extra-financières pourraient voir le jour au cours des prochaines années. 

Pour les entreprises et fonds d’investissements, cela représente cependant une réelle opportunité de soutenir la transition énergétique et écologique. C’est tout le système économique qui va être concerné, de près ou de loin, avec le Green Deal Européen. «Les TPE-PME ou start-ups qui proposent des solutions durables et responsables auront un accès plus facile aux financements et aux investissements », analyse l’expert. Une belle avancée, qu’il faudra concrétiser dans les années à venir pour faire de l’UE la pionnière en matière de politique bas carbone. 

elc
Emma-Louise Chaudron Rédactrice Web