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Les entreprises face au changement climatique : quels impacts et comment s’adapter ?

  • Temps de lecture: 9 - 10 min
Adaptation changement climatique
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Les effets du réchauffement climatique se font ressentir à tous les niveaux de notre société et de notre économie, y compris pour les entreprises, qui doivent adapter leurs stratégies en conséquence.

Pics de chaleur, tempêtes, épisodes de sécheresse, inondations… Les événements météorologiques extrêmes liés au réchauffement climatique se multiplient et s’intensifient chaque année. Des phénomènes qui ont des conséquences dramatiques sur l’environnement, notre société et l’économie, alors que le réchauffement de la planète n’atteint « seulement » qu'un peu plus d’un degré en moyenne par rapport à la période pré-industrielle. Il est donc essentiel que tous les acteurs se mobilisent, y compris les entreprises, sur lesquelles cette nouvelle donne climatique exerce une pression croissante. 

Les dirigeants doivent désormais intégrer les risques climatiques dans leurs réflexions et stratégies, afin d’assurer la résilience de leur société sur le long terme. Mais concrètement, quels sont les risques du changement climatique sur les entreprises ? Et comment peuvent-elles s’adapter à ses effets tout en maintenant leur croissance et leur rentabilité ? Big média répond à toutes vos questions sur le sujet.

Qu’est-ce que le réchauffement climatique ?

Le réchauffement climatique est un phénomène global qui renvoie à l’augmentation dans l’atmosphère de la concentration en gaz à effet de serre (GES) du fait des activités humaines et qui se traduit par une hausse générale des températures moyennes, perturbant de ce fait les équilibres météorologiques et les écosystèmes.

La définition du changement et du réchauffement climatique par le GIEC

Le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC), qui évalue l’état des connaissances sur l’évolution du climat, ses causes et ses impacts, définit le changement climatique comme une « variation de l’état du climat, qu’on peut déceler (par exemple au moyen de tests statistiques) par des modifications de la moyenne et/ou de la variabilité de ses propriétés et qui persiste pendant une longue période, généralement pendant des décennies ou plus ». Ces changements peuvent être provoqués par des processus naturels mais aussi être attribués directement ou indirectement à des activités humaines. 

Ce sont ces dernières qui, pour le GIEC, ont sans équivoque « provoqué le réchauffement de la planète », principalement par le biais des émissions de gaz à effet de serre. Ces derniers, présents naturellement dans l’atmosphère, jouent un rôle clé dans la régulation du climat en retenant une partie de la chaleur émise par la Terre. L’effet de serre est le phénomène naturel qui rend possible la vie sur notre planète. Toutefois, les activités humaines et notamment la combustion des énergies fossiles, multiplient les émissions de GES dans l’atmosphère et exacerbe ce phénomène, provoquant ainsi une hausse de la température des surfaces.

Selon le 6ᵉ rapport d’évaluation du GIEC, la température de la surface du globe s’est élevée d’1,1 °C par rapport à la période pré-industrielle. D’après le groupe d’experts, le réchauffement de la Terre atteindra 1,5 °C dès le début des années 2030, et ce, quels que soient les scénarios d'émission envisagés.

Quelles sont les conséquences du réchauffement climatique ?

Cette modification du système climatique global a des conséquences environnementales concrètes : hausse des températures, augmentation de la fréquence et de l’ampleur des phénomènes météorologiques extrêmes (inondations, incendies, tempêtes), montée des eaux, perte de biodiversité, etc. Si l’ensemble de la planète subit ces impacts, leur ampleur diffère selon les régions et leur vulnérabilité.

Au-delà de ces conséquences sur la nature, le changement climatique constitue une menace importante pour la société et notre économie, en perturbant directement ou indirectement, la productivité et la viabilité de tous les secteurs économiques.

 

Changement climatique carte des impacts 2050

Source : Ministère de la Transition Écologique

Quelle est la stratégie de la France en matière de réchauffement climatique ?

Afin de limiter les impacts du changement climatique sur l’environnement et les activités socio-économiques du pays, la France a adopté en 2011 un premier Plan national d’adaptation au changement climatique (PNACC) pour une période de 5 ans. Intersectoriel et interministériel, ce plan mené par par le Ministère de l'Écologie incluait 242 mesures tournées autour de 4 objectifs : 

  • la protection des personnes et des biens ;
  • la limitation des coûts ;
  • la préservation du patrimoine naturel ;
  • éviter les inégalités devant les risques.

Ce plan a été actualisé fin 2018, donnant lieu à un 2e Plan national d’adaptation au changement climatique (PNACC-2) en cohérence avec l’Accord de Paris. L’objectif : viser « une adaptation effective dès le milieu du XXIe siècle à un climat régional en métropole et dans les outre-mer cohérent avec une hausse de température de +1,5 à 2 °C au niveau mondial par rapport au XIXe siècle ». 

Le ministre de la Transition écologique Christophe Béchu a récemment annoncé que le PNACC-3, doté d’une cinquantaine de mesures, serait publié en 2024.

Les effets et risques du changement climatique sur les entreprises

Le dérèglement climatique affecte, à des degrés divers, toutes les entreprises et ses effets présentent certains risques pour les travailleurs, mais également, in fine, pour la croissance économique des structures. Ces conséquences peuvent être directes ou indirectes et affecter l’ensemble de la chaîne de valeur des sociétés, les rendant vulnérables à des phénomènes météorologiques souvent hors du contrôle de leurs dirigeants.

Impact du climat sur les PME-ETI

Source : Bpifrance Le lab, Les PME - ETI face aux enjeux climatiques : de la résilience à l’opportunité, les clés du passage à l’action, 2021

Les risques climatiques directs sur l'entreprise

Augmentation de la fréquence et de l’intensité des événements climatiques extrêmes (inondations, incendies de forêt…), hausse des températures et des vagues de chaleur, multiplication des épisodes de sécheresse, modification des écosystèmes et raréfaction des ressources… Toutes ces conséquences du réchauffement climatique présentent des risques directs pour les opérations des entreprises et donc leur croissance. Parmi ces derniers on peut distinguer : 

  • l’impact négatif sur la santé des collaborateurs, qui provoque une baisse de la productivité, affecte la qualité des relations de travail au sein de l’entreprise et/ou avec les clients, et augmente les risques d’accidents du travail. On estime qu’entre 14 % et 36 % des travailleurs sont exposés à la chaleur en France, principalement dans les métiers agricoles ou liés au bâtiment. Ce « stress thermique » tend à provoquer fatigue et épuisement, et donc une baisse de la vigilance et de la concentration et une augmentation des temps de réaction et de la nervosité. Selon l’étude du cabinet Goodwill Management « Les risques climatiques pour les TPE/PME », 5,3 millions de TPE et PME seront exposés à plus de 50 jours anormalement chauds en 2050, soit 6 fois plus que sur la période 1976-2005.

métiers exposés température climat

Source: France Stratégie

  • la hausse des coûts d’exploitation face aux risques accrus d’exposition à certaines catastrophes naturelles. Pour certaines entreprises situées dans des zones à risque, cela signifie faire face à l’augmentation des coûts d’assurance, investir dans le renforcement de leurs infrastructures, voire déplacer leurs activités (par exemple, pour les secteurs sur le littoral telles que les industries pétro-chimiques).
  • la menace du cœur d’activité pour certains secteurs face aux changements de conditions climatiques et à la raréfaction de certaines ressources naturelles, les obligeant à repenser leur modèle économique (agriculture, pêche, activités minières, tourisme nautique ou de montagne, fournisseurs d’énergie, etc).

Comme le montre ce graphique réalisé par Bpifrance Le lab, les effets du dérèglement climatique peuvent perturber l’ensemble de la chaîne de valeur d’une entreprise, de l’approvisionnement jusqu’à la distribution : 

Enjeux d'adaptation au changement climatique

Source : Bpifrance Le lab, Les PME - ETI face aux enjeux climatiques : de la résilience à l’opportunité, les clés du passage à l’action, 2021

Les risques climatiques indirects sur l'entreprise

Le changement climatique provoque par ailleurs des effets indirects, mais tout aussi préjudiciables, pour les entreprises. On peut notamment citer :

  • les risques de transition, c’est-à-dire les conséquences financières liées à l'adaptation d’une entreprise vers un modèle économique bas-carbone. Celle-ci doit, par exemple, faire face à l’obsolescence de certaines offres ou à la décroissance de certains marchés ;
  • les risques réglementaires, dans un contexte de lois et de mesures de plus en plus contraignantes (augmentation programmée du prix du carbone, renforcement des obligations de reporting, réglementation sur les produits et les services avec affichage environnemental, etc.) ;
  • les risques financiers, liés aux investissements nécessaires pour les entreprises afin de s’adapter à cette nouvelle donne climatique, par exemple en matière de R&D ou de nouvelles technologies ;
  • les risques juridiques et de responsabilité, qui font référence aux recours en justice contre entreprises accusées de participer au changement climatique ou d’être inactives ;
  • les risques réputationnels, qui concernent la marque employeur. L’engagement d’une entreprise dans la lutte contre le réchauffement climatique est un critère de plus en plus important pour les consommateurs et les clients, mais également pour les potentiels futurs collaborateurs.

Pourquoi les entreprises doivent-elles s'adapter au changement climatique ?

Adopter une démarche de lutte contre le réchauffement climatique est essentielle pour les entreprises à différents niveaux. 

En plus de minimiser les risques évoqués précédemment, cet engagement offre certains bénéfices. Intégrer des pratiques de développement durable permet ainsi aux entreprises de contribuer à la lutte globale contre le dérèglement climatique et d’apporter sa pierre à l’édifice, tout en les rendant plus résilientes, flexibles et compétitives. En effet, travailler sur ces enjeux peut aider une société à développer une certaine expérience dont elle peut tirer profit sur d’autres fronts et peut lui permettre de renforcer sa capacité d’adaptation face aux imprévus. Il ne faut pas négliger également les opportunités économiques que présente une telle démarche, que ce soit en matière d’innovation, avec le développement de technologies vertes de pointe, ou des avantages de la transition vers un modèle bas carbone (économies sur la facture énergétique, par exemple).

Il s’agit également pour les entreprises de se mettre en conformité avec les lois existantes et les futures réglementations qui tendent à être de plus en plus contraignantes, à la fois au niveau européen (objectif neutralité carbone d’ici 2050, Pacte vert pour l’Europe) et au niveau national (BEGES, Stratégie Nationale Bas-Carbone, le décret tertiaire, la loi Énergie-Climat, la loi d’orientation des mobilités, le reporting climatique pour les entreprises, etc.)

Quelles sont les solutions permettant aux entreprises de s’adapter face au réchauffement climatique ?

Si de nombreux dirigeants d’entreprises se disent conscients de l’urgence climatique, ils sont peu nombreux à intégrer cet aspect dans leur stratégie et à mettre en place des mesures d’adaptation. La faute parfois à des incertitudes ou méconnaissances quant aux solutions possibles pour lutter efficacement contre le réchauffement climatique, tout en maintenant la croissance de l’entreprise. Or adopter une démarche d’adaptation est capitale pour les sociétés, afin de renforcer la robustesse de leur chaîne de valeur et d’assurer leur pérennité sur le long terme.

Enjeux climat et stratégie des dirigeants

Source : Bpifrance Le Lab, Les dirigeants de PME-ETI face à l'urgence climatique, 2020.

 

Pour les dirigeants d’entreprise, il s’agit :

  • dans un premier temps, d’analyser les impacts du changement climatique et identifier précisément les risques auxquels sa société est confrontée, et à quels niveaux de la chaîne de valeur.
  • d’élaborer un plan incluant des mesures à même de l’aider à lutter contre les effets du changement climatique et de mettre en place une stratégie d’adaptation selon plusieurs scénarios. Ces actions sont différentes selon la société, sa taille, son secteur d’activité et sa localisation.
  • de mettre en œuvre ce plan et de suivre ses objectifs, tout en évaluant ses avancées au fur à mesure et en faisant évoluer ses mesures en fonction des résultats obtenus.

Les méthodes de décision des risques liés au changement climatique 

Dans son étude « En entreprise, comment prendre des décisions pour s’adapter au changement climatique ? », l’ADEME met en avant 3 types de planifications testées et éprouvées dans plusieurs entreprises.

La planification par scénarios

La planification par scénarios consiste à imaginer différents scénarios de futurs possibles pour l’entreprise et de les tester sur son modèle d’affaires afin d’identifier les risques et les opportunités. Cette méthode est adaptée au plus grand nombre, qu’importe la taille de l’entreprise ou son secteur, et son niveau de maturité sur ces enjeux.

La planification par scénarios
Source: ADEME

La prise de décision robuste

La méthode de prise de décision robuste permet de confronter sa stratégie à une multitude de scénarios générés par un outil informatique et de l’ajuster jusqu’à ce qu’elle soit la plus efficace possible dans un nombre satisfaisant de scénarios. Il s’agit là d’obtenir une vision au plus proche de la réalité. Sont principalement concernées les grandes entreprises gestionnaires d’infrastructures lourdes (eau, transport, énergie).

La prise de décision robuste
Source: ADEME

La planification par trajectoire

Cette troisième méthode de planification conseille aux entreprises de construire des trajectoires d’adaptation qui combinent des actions incrémentales immédiates et des actions plus ambitieuses, qu’il convient d’actionner lorsque les premières ne sont plus suffisantes. Cela permet notamment aux sociétés d’éviter le risque de sous-investissement ou de surinvestissement. La planification par trajectoire est adaptée pour les moyennes et grandes entreprises, principalement les gestionnaires d’infrastructures lourdes (eau, transport, énergie) et les structures agricoles ou agroalimentaires.

La planification par trajectoire
Source: ADEME

Bon à savoir : l’autodiagnostic « Climatomètre »
Lancé par Bpifrance Université en partenariat avec l’ADEME, cet outil en ligne permet aux entreprises de réaliser en seulement 15 minutes une autoévaluation pour faire le point sur leur maturité vis-à-vis de la transition écologique et énergétique et de l’impact de leurs activités sur l’environnement. À la clé : des recommandations personnalisées et l’accès à des ressources complémentaires (formations en ligne, aides de financement, etc.).
 

Les aides et mécanismes de financement pour les entreprises

Les entreprises qui s'engagent en faveur de l'environnement peuvent bénéficier de certaines aides et mécanismes de soutien, tels que :

  • le Diag Eco-Flux, porté par Bpifrance et l’ADEME ;
  • le Prêt Vert de Bpifrance pour cofinancer les programmes d’investissement de TPE, PME et ETI (dans le cadre des actions préconisées par le Diag Eco-Flux) ;
  • le Prêt Économies d’Énergies de Bpifrance, en partenariat avec le Ministère de la Transition écologique ;
  • le Prêt Action Climat de Bpifrance ;
  • les Certificats d’économies d’énergie (CEE) ;
  • les aides de l’ADEME (Tremplin, Recherche, développement et innovation, à l’investissement, aide aux études et conseils).

Les stratégies d'adaptation des entreprises françaises face aux enjeux climatiques 

Dans son étude « Les PME - ETI face aux enjeux climatiques : de la résilience à l’opportunité, les clés du passage à l’action », Bpifrance Le Lab met en avant 11 cas de PME-ETI précurseurs en matière d’accélération de la transition climatique dans les secteurs de l’industrie, du transport, de l’énergie, du commerce, du bâtiment et de l’agriculture. Ces exemples concrets offrent des sources d’inspiration et perspectives aux dirigeants d’entreprises désireux d’entreprendre une telle démarche de transition.

Parmi ces exemples on peut citer le groupe Heppner (transport) qui a mis en place un programme de transition énergétique pour répondre à ses objectifs de décarbonation. Ce plan comprend notamment le déploiement de véhicules roulant au gaz naturel (avec l’ambition de convertir 50 % de la flotte d’ici 2025), le développement de nouveaux modes de transport décarbonés, ou encore le travail sur l’efficacité énergétique et la réduction de consommation de matières premières. 

L’entreprise de BTP Mazaud a, quant à elle, misé sur le développement de la construction durable, la chasse aux gaspillages et la décarbonation de ses activités, en s’appuyant sur la R&D.

L’étude de Bpifrance Le Lab a identifié au total dix chantiers de la transition que lesquels les entreprises peuvent se positionner, et qui s’articulent autour de 4 axes (énergie, matières premières, mobilité, puits de carbone) :

10 chantiers transition bas carbone

Source : Bpifrance Le lab, Les PME - ETI face aux enjeux climatiques : de la résilience à l’opportunité, les clés du passage à l’action, 2021

Exemples de stratégies d'adaptation des entreprises françaises au changement climatique 

L’ADEME, dans son étude « En entreprise, comment s’engager dans un parcours d’adaptation au changement climatique ? », met également en lumière des plans d’action concrets d’entreprises françaises. Parmi celles-ci : VINCI Autoroutes, qui a initié une nouvelle stratégie dès 2016 suite à l’inondation de l’A10, pour prévoir les risques que présente le changement climatique sur ses activités de maîtrise d’ouvrage et d’exploitation. La société intègre désormais ces données dès la conception des projets et dans le cycle d’exploitation et de maintenance des chaussées, et travaille sur l’identification de solutions techniques à même de renforcer la résilience des ouvrages tout au long du cycle de vie de l’infrastructure.

Intégration du changement climatique au cycle de gestion des chaussées
Source : ADEME

On peut citer également Charles et Alice, qui a adopté une démarche d’économie d’eau depuis 2003 sur ses sites, afin de sécuriser son activité dans un territoire sous tension hydrique, le Sud-Est. Résultat :  une réduction de -70 % des consommations d’eau (600 000 m3 en 2003 à 170 000 m3 en 2023 avec une production triplée). 

 

Sources :
Les entreprises face au défi climatique, Chambre de commerce et d’industrie

Le travail à l’épreuve du changement climatique, France Stratégie

Comment réaliser un diagnostic des impacts du changement climatique sur mon entreprise ?, ADEME

Capacité d’adaptation au changement climatique des entreprises, ADEME

Comprendre le changement climatique, Gouv.fr

Publication du 6e rapport de synthèse du GIEC, Ministère de la Transition Écologique

En entreprise, comment prendre des décisions pour s’adapter au changement climatique ?, ADEME

Les PME - ETI face aux enjeux climatiques : de la résilience à l’opportunité, les clés du passage à l’action, Bpifrance

Adaptation de la France au changement climatique, Ministère de la Transition Écologique