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Énergie marine renouvelable : définition, fonctionnement et avantages

  • Temps de lecture: 6 - 7 min
Energie marine renouvelable
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Les énergies marines ont un potentiel de développement significatif, notamment en France. Dans le monde, ces technologies sont encore peu exploitées, bien qu’ayant un potentiel de production, estimé entre 70 000 et 80 000 TWh (source IRENA). Faisons le point sur les nouvelles technologies de production d’électricité renouvelable, leur fonctionnement et leurs avantages.

Énergies marines renouvelables, « thalasso-énergies » ou « énergies bleues » : tirer de l’énergie de la mer et des océans n’est pas une pratique nouvelle… Certains principes technologiques sont même utilisés depuis l’Antiquité ! Pourtant, la filière des technologies renouvelables en mer est en plein essor pour répondre aux défis de la transition écologique et pour contribuer à décarboner l’électricité. Et la France présente de sérieux atouts pour développer ces innovations et dépasser le stade de la recherche et de l’expérimentation. Alors, qu’est-ce que l’énergie marine renouvelable ? Quels sont ses enjeux ? Comment l’exploite-t-on aujourd’hui et quel est son potentiel pour demain ? Big média dresse le portrait de cette filière.

Énergie marine renouvelable : définition et enjeux

Qu’est-ce que l’énergie marine renouvelable ?

Selon le Ministère de la Transition Écologique, on rassemble sous l’expression énergies marines renouvelables (EMR) « l’ensemble des technologies permettant de produire de l’électricité à partir de différentes forces ou ressources du milieu marin ». En d’autres termes, les énergies marines renouvelables sont le fruit de l’utilisation des ressources générées par les mers et les océans, telles que les marées, la houle, les courants, etc. pour créer de l’énergie électrique de manière décarbonée. 

Les enjeux de l’énergie marine renouvelable en matière de transition énergétique et d’environnement

L’énergie marine renouvelable constitue une des réponses à explorer pour atteindre les objectifs de neutralité carbone d’ici à 2050 fixés par le Pacte vert pour l'Europe et l’Accord de Paris. Elle peut également contribuer à l’objectif français de produire 40 % d’électricité renouvelable à l’horizon 2030. 
Toutefois, pour accélérer la transition énergétique de la France, ces technologies devront gagner en maturité, ce qui nécessite un accroissement des investissements alloués à leur développement. De plus, il sera nécessaire de veiller à maîtriser l’impact environnemental des installations.

Les enjeux de l’énergie marine renouvelable en termes économiques et industriels

Si les énergies marines renouvelables représentent une source potentielle de forte création d’emplois, elles soulèvent néanmoins des enjeux économiques. Ainsi, leur rendement reste méconnu alors que le coût des expérimentations autour de ces technologies reste encore très important : cela pose la question de leur éventuelle rentabilité. Il faut également prendre en compte l’impact financier des lourds aménagements du réseau électrique nécessaires pour acheminer l’électricité produite en mer jusqu’aux terres.

Les énergies marines renouvelables posent également des questions sociétales, notamment en termes de formation des futures compétences requises. Dans une perspective plus négative, elles peuvent être considérées comme la source de potentiels conflits d’utilisation des côtes, notamment avec les pêcheurs.

Enfin, des enjeux de réglementation autour des EMR vont rapidement faire leur apparition. Qu’en sera-t-il en effet des normes d’utilisation des espaces maritimes et de tarification de l’électricité produite par ces installations ?

Comment exploiter l'énergie marine ? Les différents types d’énergies marines renouvelables 

La houle, les courants, les marées, le gradient de température entre les eaux de surface chaudes et les eaux froides en profondeur font partie des différents éléments qu’il est possible d’exploiter pour produire de l’énergie marine. Voyons ensemble les différents types d’énergies marines renouvelables.

L’énergie hydrolienne issue des courants marins

L’énergie hydrolienne consiste à utiliser l’énergie des courants de marée pour mettre en mouvement une hélice sous-marine, qui se rapproche d’une éolienne sous-marine, et ainsi produire de l’énergie. Rappelons que les courants sont d’immenses quantités d’eau mises en mouvement par le vent, les différences de température, de densité et de salinité de l’eau…

Cette technologie a de nombreux avantages. Dans la mesure où le mouvement des courants peut être calculé sur plusieurs mois, voire plusieurs années, la production est très prévisible. De plus, en raison de la densité de l’eau, les installations hydroliennes sont peu gourmandes en espace, contrairement aux éoliennes terrestres ou off-shore.

La France dispose d’un bon potentiel de développement de cette technologie. Les zones côtières du Nord-Ouest de la France présentent en effet des courants particulièrement puissants, susceptibles d’abriter dans le futur des projets de développement de cette technologie.

Toutefois, l’installation en batterie de ces hydroliennes pose question face au trafic maritime très important dans ces zones : l’emplacement des futures fermes devra donc être soigneusement étudié afin de limiter le risque de collision avec les bateaux. De plus, la présence importante d’algues et de sable exigera un entretien extrêmement rigoureux pour éviter tout risque de blocage.

L’énergie marémotrice issue des marées

L’énergie marémotrice exploite le mouvement perpétuel des marées (flux et reflux) pour actionner des turbines incorporées dans un barrage construit sur l’estuaire d’un fleuve, et ainsi créer de l’électricité via un générateur. Le fonctionnement de cette technologie se rapproche de celui des barrages hydroélectriques. Ainsi, une centrale « marémotrice » retient d’immenses quantités d’eau dans un bassin de rétention, qui est vidé deux fois par jour. Le mouvement de l’eau dans les turbines entraîne alors un générateur, ce qui produit de l’électricité.

À noter que la France est pionnière dans cette technologie, le barrage et usine marémotrice de la Rance ayant été mis en service en 1966.

L’énergie houlomotrice issue des vagues et de la houle

L’énergie houlomotrice provient de la houle, c’est-à-dire de l’utilisation de l’énergie des vagues pour ramener sur la côte de l’énergie collectée au large. Cette technologie en est encore au stade de recherche et d’expérimentation, et explore plusieurs techniques de récupération :

  • Des caissons flottants articulés entraînant des pistons, 
  • Des colonnes d’eau oscillantes côtières ou immergées, 
  • Les débordements de chenal…

L’énergie thermique des mers issue de la chaleur des océans

Particulièrement adaptée en zones intertropicales, l’énergie thermique des mers tire parti de l’importance des gradients de températures entre les eaux de surface chaudes (22 °C et plus) et les eaux froides en profondeur (autour de 3°C à 1 000 m) pour produire de l’énergie. Cette technologie fait actuellement l’objet d’études dans les territoires d’Outre-Mer, par exemple en Martinique, où le différentiel d’au moins 20 °C (ce que l’on appelle le gradient de température) permet de vaporiser un fluide qui, une fois détendu, entraîne un turbogénérateur vecteur d’énergie.

Sea Water Air Conditioning (SWAC)

La technologie du SWAC s’appuie sur l’extraction d’une eau puisée en grande profondeur pour alimenter un réseau et créer un système de climatisation. Elle s’avère intéressante notamment pour les territoires d’Outre-Mer dont les systèmes énergétiques sont mis en tension par le développement de la climatisation.

Schéma récapitulatif des différentes technologies d’exploitation de l'énergie marine

Différentes filières d'énergies marines renouvelables
Source : Différentes filières d'énergies marines renouvelables, researchgate.net, novembre 2020

 


Notons tout de même qu’aussi prometteuses soient-elles, à l’image de l’énergie osmotique, ces technologies sont encore en phase d’expérimentation pour la plupart, contrairement à l’énergie éolienne offshore par exemple. Cette dernière détient en effet le plus fort potentiel de développement d’énergie en milieu marin : sept projets de parcs éoliens en mer ont été attribués depuis 2012 pour 15 000 emplois directs ou indirects estimés. Les régions Normandie, Bretagne sud, Méditerranée et zone sud-Atlantique sont les plus concernées.

Potentiel de développement des énergies marines renouvelables 

En France

À ce jour, le parc de production d’énergie marine en France est encore inexistant, à l’exception notable de l’usine marémotrice de la Rance et des 2 parcs éoliens offshore au large de Saint Nazaire et de Fécamp. Toutefois, avec ses 11 millions de km² d’eaux sous sa juridiction et ses 7 000 kilomètres de côtes (dont 1 500 outre-mer), la France dispose d’atouts importants pour le développement de cette filière. Ainsi, les côtes de Normandie, de Bretagne et des Pays de la Loire sont particulièrement adaptées à l’énergie hydrolienne : elles représenteraient 20 % du potentiel européen en la matière. L'énergie thermique et SWAC pourraient quant à elles être étendues au large des côtes des territoires d’Outre-Mer. Dans les régions Aquitaine, Languedoc-Roussillon et Provence Alpes Côte d'Azur, le potentiel de développement est plus faible mais pas inexistant. 

D’après le Ministère de la Transition Écologique, la production d'énergies marines renouvelables pourrait atteindre à terme entre 2 000 et 3 000 MW.

La part de l'énergie marine dans les énergies renouvelables en France

Aujourd’hui, l’énergie marine représente moins de 0,1 % du mix énergétique français, se situant ainsi à la dernière place des énergies renouvelables, derrière l’énergie hydraulique, l’énergie éolienne, la biomasse, l’énergie solaire ou encore la géothermie.

 

Production primaire d'énergies renouvelables par filière en 2021

 

Les énergies marines renouvelables et la programmation pluriannuelle de l’énergie

Au 31 décembre 2023, la programmation pluriannuelle de l’énergie a fixé des objectifs de l'ordre de 200 à 2 000 MW de production supplémentaire (par rapport aux 100 MW déjà produits annuellement). Le delta des prévisions est important en raison de l’immaturité des technologies mais est voué à s’affiner en fonction du retour d’expérience des fermes pilotes et sous condition de prix.

Le soutien à la recherche et l’innovation en faveur des énergies marines renouvelables

L’État, via les appels à projets lancés par l’ADEME (dans le cadre du programme des investissements d’avenir ou PIA), apporte son soutien via des financements : 

  • de projets de recherche ;
  • de projets de démonstration de briques technologiques ;
  • de fermes pré-commerciales.

La stratégie française de développement des énergies marines renouvelables comprend à la fois le soutien de la recherche et du déploiement commercial des technologies.

Carte : La France et son littoral : un potentiel important pour les énergies renouvelables en mer

Selon le Ministère de la Transition écologique, le plus fort potentiel de développement en France concerne l’énergie hydrolienne et marémotrice.

Potentiel Européen pour l'énergie hydrolienne Potentiel européen pour l'énergie marémotrice

Source : ecologie.gouv.fr, Énergies marines renouvelables, décembre 2018

 

En Europe et dans le monde

L’Agence Internationale de l’Energie estime le potentiel total théorique des énergies marines dans le monde entre 20 000 et 90 000 TWh/an. Cela surpasse la consommation actuelle mondiale, estimée à 16 000 TWh/an. C’est pourquoi de grands espoirs sont fondés sur l’énergie houlomotrice, qui pourrait à elle seule fournir entre 8 000 et 80 000 TWh/an, devant l’énergie thermique des mers (près de 10 000 TWh/an) et les énergies hydroliennes et marémotrices (entre 300 et 800 TWh/an).

La Grande-Bretagne semble être le pays le plus à même de développer sa capacité d’énergie marine dans la décennie à venir. Le Gouvernement britannique a en effet accordé des concessions pour plus de 1 GW, dont le potentiel, toutes technologies confondues, a été évalué à plus de 10 GW.

Quels sont les avantages et les limites de l'énergie marine ?

L’énergie marine renouvelable a des avantages notables. Il s’agit en effet d’une source d'énergie inépuisable sur une planète recouverte à 72 % d’eau ! Bien qu’encore peu exploitée, l’eau des mers et des océans est une ressource disponible dans de nombreux pays du monde. Certaines technologies sont par ailleurs largement éprouvées, telles que l’énergie marémotrice. De plus, son exploitation favorise une production d’énergie décarbonée. Enfin, l’énergie marine renouvelable a un impact visuel moindre : les hydroliennes, par exemple, sont totalement immergées.  

Cependant, elle n’est pas dépourvue de limites :

  • Un fonctionnement intermittent, bien que prédictible très en amont pour beaucoup de technologies, contrairement au solaire et à l’éolien ; 
  • Des coûts encore très importants, de l’investissement initial à l’entretien. En effet, les installations sont soumises à des conditions extrêmes, notamment la salinité qui accélère la corrosion ;
  • Des technologies encore immatures pour la plupart ;
  • Une difficulté d’accès pour les installations situées en pleine mer ;
  • Un impact sur la faune marine.

Exemples d'entreprises françaises qui surfent sur la vague de l'énergie marine 

Au-delà de l’usine marémotrice de la Rance en France inaugurée en 1966, qui assure une production moyenne de 500 GWh/an pour une puissance installée de 240 MW, d’autres entreprises françaises s’engagent sur le terrain des énergies marines. 

C’est notamment le cas de Sabella, qui développe une hydrolienne à turbine à axe horizontal de 10 mètres de diamètre et de 500 kW de puissance. Ce projet est au stade de la démonstration et anticipe l'industrialisation d'hydroliennes de 1 à 2 MW de puissance.

La société Open-Hydro (filiale de DCNS) travaille quant à elle sur la production du premier prototype d’une hydrolienne d’une puissance de 0.5 MW. Celle-ci a été immergée pour être testée en conditions réelles afin de confirmer la viabilité de cette technologie (tant au niveau technique qu’économique et environnemental).

Enfin, l'entreprise DCNS s’est engagée dans un projet de plateforme flottante de production d’électricité, d’une puissance de 16 MW. Nommé NEMO, ce projet est porté par Akuo Energy et est en cours de développement.

 

SOURCES : 
Énergies marines renouvelables - Ministère de la Transition Écologique - https://www.ecologie.gouv.fr/energies-marines-renouvelables-0 
Chiffres clés des énergies renouvelables - Édition 2022 - https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/CGDD_A6_CHIFFRES_CLES_EnR_2022_v3_010922_GB_signets.pdf 
Énergies marines renouvelables et innovation - Secrétariat d’État chargé de la mer et de la biodiversité - https://mer.gouv.fr/energies-marines-renouvelables-et-innovation