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Énergie marémotrice : fonctionnement des usines et avantages

  • Temps de lecture: 5 min
Energié Marémotrice
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Utiliser la force du mouvement perpétuel de la mer pour produire de l’électricité : c’est la promesse d’une usine marémotrice. Présentation du fonctionnement et des avantages de cette énergie hydraulique renouvelable.

Énergie solaire, énergie biomasse, énergie éolienne, énergie houlomotrice, énergie hydraulique… vous connaissez déjà très certainement ces énergies renouvelables. Mais saviez-vous qu’il est aussi possible d’utiliser la force des marées pour produire de l’électricité et qu’il existe en France un des exemples les plus performants de centrale marémotrice : le barrage de la Rance dans les Côtes d’Armor en Bretagne. Comment fonctionne une usine marémotrice pour produire de l’électricité renouvelable ? Quels sont les avantages de cette technologie ? Quelles en sont les limites ? Le point avec Big média.

Qu’est-ce que l’énergie marémotrice ?

L’énergie marine marémotrice est une énergie renouvelable produite à partir du mouvement perpétuel des marées. Plus précisément, une centrale hydraulique marémotrice exploite le marnage, c’est-à-dire la différence de niveau entre la haute mer et la basse mer, et utilise ce potentiel pour actionner des turbines produisant de l'électricité renouvelable

Ce procédé n’est pas nouveau : on en connaissait déjà les principes dans l’Antiquité et des moulins à marée datant du Moyen  ge ont également été retrouvés !

Comment fonctionne une usine marémotrice ?

Le principe des marées 

Les marées caractérisent le phénomène de contraction (reflux des eaux) et d’expansion (flux) des mers. Elles interviennent deux fois par jour durant un cycle, sous l’influence de 3 paramètres :

  • la rotation de la Terre sur elle-même ;
  • la révolution de la Terre autour du Soleil ;
  • la rotation de la Lune autour de la Terre.

Principe de fonctionnement d'une centrale marémotrice avec simple bassin : effet au remplissage 

Simple effet au remplissage

Principe de fonctionnement d'une centrale marémotrice avec simple bassin : effet au vidage

Simple effet au vidage

Comment produit-on l’énergie marémotrice ?

Pour produire de l'énergie marémotrice, il est nécessaire de construire une centrale, comme l’usine marémotrice de la Rance, en France, qui utilise la force des marées de la Manche. Concrètement, on construit, sur un estuaire, un barrage muni de turbines, lesquelles sont immergées sous la mer.

Cette usine peut alors fonctionner de deux manières : 

  • soit en circuit simple : l’usine marémotrice produit de l’énergie uniquement lors des marées descendantes ;
  • soit en circuit double : la centrale marémotrice produit de l’énergie à marée descendante et montante. 

À chaque marée, les vannes sont ouvertes et l’eau enclenche les turbines hydroélectriques sous-marines, ce qui crée de l’énergie.

Fonctionnement de l’usine marémotrice de la Rance

Usine marémotrice
Source : EDF

 

L’énergie marémotrice en France 

L’usine marémotrice de la Rance a été inaugurée en 1966. Située dans les Côtes d’Armor, entre Dinard et Saint-Malo, il s’agit de la seule usine exploitant cette énergie en France. Son emplacement a été déterminé par les coefficients de marée de la Manche, les plus importants au monde. 

Cette unité de production d’énergie marémotrice est dotée de 24 turbines « bulbes » réversibles, actionnées dans un sens par la marée montante et dans l’autre par la marée descendante. Elle dégage une puissance de 240 mégawatts (soit 500 à 600 millions de kWh).

Part de l’énergie marémotrice dans la production d’électricité renouvelable en 2021

Production brute d'électricité renouvelable par filière en 2021
Source : Les énergies renouvelables en France | Chiffres clés des énergies renouvelables (developpement-durable.gouv.fr)

 

Jusqu’en 2011, l’usine marémotrice de la Rance était la plus importante de la planète. Elle a aujourd'hui été détrônée par la centrale sud-coréenne de Sihwa Lake qui a une puissance de 254 mégawatts. D’autres pays sont également engagés dans la construction d’usines marémotrices, comme le Canada et le Royaume-Uni qui comptent quelques unités. Des projets sont par ailleurs à l’étude en Russie, en Argentine, en Australie, en Chine et en Inde.

Quels sont les avantages de l’énergie marémotrice ? 

Une énergie fiable et prédictible

Si l'énergie marémotrice est intermittente, du fait du phénomène des marées, le mouvement perpétuel de ces dernières est bien connu des scientifiques. Les coefficients de marée sont donc connus plusieurs années à l’avance et rendent cette production d’électricité extrêmement fiable et prédictible.

Le potentiel énergétique des marées est estimé de 300 à 800 TWh/an, ce qui peut paraître peu, comparé à d’autres énergies renouvelables comme le solaire (qui se compte en pétawatts-heures, PWh, soit 1015 Wh) mais qui reste non négligeable, surtout dans un contexte de transition énergétique et d’urgence climatique. Notons par ailleurs que la durée d’exploitation d’une centrale marémotrice pourrait dépasser les 100 ans.

Un bilan environnemental controversé mais plutôt positif

Une usine marémotrice est capable de produire une énergie renouvelable très faiblement carbonée. Selon les statistiques de ADEME, l’hydraulique marin (qui comprend également les installations houlomotrices et autres centrales exploitant la mer et l’océan) dégage 6 grammes équivalent CO2/kWh. Cela compense, sur la durée d’exploitation du barrage, les émissions de CO2 durant la construction dûes aux tonnes de ciment déversées. 

Si le bilan carbone semble positif, qu’en est-il du bilan environnemental global à long terme ? Là encore, la nuance est de mise. L’exemple du barrage de la Rance montre que sa construction a généré un déséquilibre évident de l’écosystème, qui a perduré durant ses premières années d’exploitation. Toutefois, depuis, on a assisté à une recolonisation de l’estuaire par la biodiversité marine.

Quelles sont les limites des usines marémotrices ? 

L’énergie marine est encore peu développée et pour cause ! Son utilisation est largement freinée par les prérequis contraignants nécessaires à la construction. Il faut en effet savoir que l’installation d’une usine marémotrice est soumise à de nombreuses conditions : 

  • le barrage doit être situé à l’estuaire d’un fleuve, puisque la puissance des marées y est la plus tangible ;
  • l’infrastructure doit être construite sur un sol rocheux ou sablo-graveleux, seuls capables de supporter la fixation du barrage ;
  • la profondeur sous le niveau des mortes-eaux, c’est-à-dire les marées d'amplitude inférieure à la moyenne, doit être comprise entre 10 et 25 m ;
  • Le marnage minimum doit être de 5 m et idéalement entre 10 et 15 m.

Cette liste de prérequis n’est donc pas de nature à permettre la multiplication des centrales marémotrices. 

Parmi les inconvénients des usines marémotrices, on peut également citer les éléments suivants : 

  • il s’agit d’une énergie intermittente et dépendant du coefficient des marées (variable selon le moment du mois et de l’année)
  • son exploitation nécessite l’utilisation de vastes infrastructures dont la construction mobilise de lourds investissements. Les coûts de construction de la centrale de Sihwa en Corée du Sud se sont ainsi élevés à 278 millions d’euros ; 
  • des dépôts de sédiments, en amont des barrages, nécessitent d’être extraits, ce qui représente des coûts associés de plusieurs millions d’euros.

Toutes ces difficultés constituent donc une explication au faible développement de cette manière de produire de l’électricité décarbonée. Toutefois, l’innovation pourrait permettre d’exploiter l’énergie marémotrice à moindre coût, énergie que beaucoup de pays pourraient intégrer dans leur mix énergétique

Sources 
Énergies marines renouvelables - Ministère de la transition énergétique 
Qu'est-ce qu'une énergie marine ? - EDF