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DPEF (déclaration de performance extra-financière) : une obligation pour les entreprises ?

  • Temps de lecture: 7 - 8 min
DPEF
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Jugée sur des critères allant bien au-delà de l'aspect financier, la performance des entreprises est aujourd'hui regardée de près, tant par ses clients que ses investisseurs. La déclaration de performance extra-financière, dite DPEF, œuvre pour cette transparence, au regard des enjeux sociaux, sociétaux et environnementaux rencontrés par les professionnels.

Depuis plusieurs années, la conscience des effets générés par les activités des entreprises et des organisations publiques s'accentue. Consommateurs et investisseurs attendent désormais de ces entités qu’elles prennent pleinement leurs responsabilités et communiquent de manière plus transparente sur leurs impacts sociaux, environnementaux et sociétaux, ainsi que sur leur mode de gouvernance. C’est tout l’objet du reporting extra-financier, via lequel une entreprise peut - ou doit, selon les cas - publier une déclaration de performance extra-financière (DPEF), qui donne à voir les résultats de sa politique en matière de responsabilité sociétale (RSE). Qu’est-ce donc qu’une DPEF et quels sont ses objectifs ? Est-ce obligatoire pour les entreprises ? Comment rédiger une DPEF ? Big Média dresse pour vous le portrait de la DPEF en 2023.

Qu'est-ce qu'une déclaration de performance extra-financière (DPEF) ?

Avant de commencer, attardons-nous sur ce qu’est la déclaration de performance extra-financière, abrégée sous l'acronyme DPEF, ainsi que sur les motivations qui ont accompagné sa création. 

Déclaration de performance extra-financière (DPEF) : la définition

Autrement connue sous les termes de "rapportage extra-financier” ou “reporting extra-financier”, la DPEF désigne le document produit par les entreprises, détaillant l’incidence de sa performance et de ses activités sur des aspects environnementaux, sociaux et sociétaux, ainsi que son mode de gouvernance.

À destination de l'intégralité des parties prenantes de l'entreprise, des clients à ses fournisseurs, en passant par ses partenaires commerciaux et investisseurs, la déclaration de performance extra-financière est un pilier de la politique de responsabilité sociétale d'une entreprise. À noter que si ce rapport est produit dans le cadre de la responsabilité sociétale et environnementale, il est généralement plus complet qu'un rapport RSE. 

Les 5 piliers de la DPEF

La déclaration de performance extra-financière (DPEF) repose sur 5 piliers, qui sont en partie liés aux critères ESG (environnementaux, sociaux et de gouvernance) :

  • Environnement : en lien avec la transition énergétique et écologique (TEE), ce pilier englobe la gestion des ressources naturelles, les émissions de gaz à effet de serre (GES), la consommation d'énergie, la gestion des déchets, la biodiversité, etc.
  • Social : il inclut les aspects sociaux liés à l'entreprise, notamment les conditions de travail, la diversité et l'inclusion, la santé et la sécurité au travail, les droits des travailleurs, l'impact social positif dans les communautés locales, etc.
  • Gouvernance : ce pilier se concentre sur la manière dont l'entreprise est dirigée, gérée et contrôlée. Il comprend la structuration du conseil d'administration, la transparence financière, la gestion des risques, la rémunération des dirigeants, et les pratiques de gouvernance en général.
  • Éthique des affaires : ce pilier est en lien avec la transparence des pratiques de l'entreprise, y compris la lutte contre la corruption, la conformité aux normes et réglementations, la protection des droits de l'homme, etc.
  • Société : ce pilier vise à évaluer la contribution de l'entreprise au développement durable de la société. Cela peut intégrer des actions en faveur de l'éducation, de la santé, du développement local, de la réduction des inégalités, etc.

Ces 5 piliers permettent d'évaluer la performance globale d'une entreprise au-delà de ses résultats financiers, en prenant en compte ses impacts sur l'environnement, la société et sa gouvernance.

Pourquoi la DPEF a-t-elle été créée ?

Ces dernières années, de nombreux acteurs privés comme publics n’ont eu d’autre choix que de prendre conscience de leur responsabilité, aussi bien sur des questions financières et économiques que sur des questions climatiques. Avec des activités reconnues comme réel facteur d’accélération du réchauffement climatique, les sociétés sont aujourd’hui dotées d’une responsabilité environnementale, avec pour finalité la réduction imminente de leurs émissions de gaz à effet de serre (GES). 

C’est la raison pour laquelle la performance globale de ces organisations ne peut plus faire l’objet d’une évaluation uniquement focalisée sur des indicateurs financiers et économiques. Leur performance doit également être évaluée à l’aune de critères dit “extra-financiers”, c’est-à-dire ayant trait à l’action environnementale, sociale et sociétale de l’entreprise. Pour cela, un document facilitant la communication sur ce sujet à direction des parties prenantes de l’entreprise a été créé : la DPEF.

Quels sont les objectifs de la DPEF ?

Transcrite d’une directive européenne datant de 2014, la DPEF encourage les entreprises à intégrer des critères de durabilité dans leur stratégie RSE, incitant à une gestion responsable et à l'amélioration continue des performances extra-financières.

Elle doit parallèlement permettre à l’écosystème d’une entreprise d'appréhender la pertinence de sa démarche RSE. Plus synthétique, concise et accessible qu’un reporting RSE, la DPEF vise à accroître la transparence des entreprises en matière de performance extra-financière. Elle fournit ainsi une évaluation globale de la performance de l'entreprise dans des domaines tels que l'environnement, le social, la gouvernance, l'éthique, etc. 

Permettant une communication claire et complète envers les parties prenantes, telles que les investisseurs, les clients et les employés, elle donne une image complète des performances de l'entreprise, au-delà des simples critères financiers. Elle se révèle ainsi particulièrement utile à tous ceux désireux d’en savoir plus sur cet aspect de l’entreprise.

Enfin, cette déclaration de performance extra-financière contribue à identifier et gérer les risques non financiers auxquels l'entreprise peut être confrontée, favorisant ainsi une approche proactive de la gestion des risques. Véritable feuille de route pour certaines sociétés, elle relève néanmoins d’un cadre juridique précis. 

Quelles sont les lois qui entourent la DPEF ?

En France, les articles L. 225-102-1, et R. 225-104 à R. 225-105-2 (2017) du code de commerce régissent la déclaration annuelle de performance extra-financière, complétant la loi Sapin 2 ou le devoir de vigilance. 

Il s’agit de la transcription d'une directive européenne datant de 2014 (aussi appelée NFRD  pour Non Financial Reporting Directive) publiée en vue de contribuer aux 6 objectifs environnementaux fixés par l'Union européenne :  

  • l’atténuation du réchauffement planétaire ;
  • l’adaptation aux évolutions du climat ;
  • l’utilisation durable et la protection de l’eau et ressources marines ;
  • la transition vers une économie circulaire avec la réduction des déchets et l’augmentation de l’utilisation de matières premières secondaires ;
  • la prévention et le contrôle de la pollution ;
  • la protection et la restauration de la biodiversité et des écosystèmes.

Afin de répondre à ces lignes directrices essentielles pour conserver une planète habitable pour tous les habitants, certaines entreprises ou organisations sont, de fait, soumises à la DPEF.

La DPEF obligatoire pour les entreprises : qui est concerné ?

Le reporting extra-financier est une obligation légale pour un certain nombre d’entreprises : 

  • les sociétés cotées comptant plus de 500 employés et dont le bilan s'avère supérieur à 20 millions d’euros, ou dont le chiffre d’affaires est supérieur à 40 millions d'euros ;
  • les entreprises non cotées dotées d'un effectif moyen de 500 employés, dont le bilan ou le chiffre d'affaires excède 100 millions d’euros.

En France, banques (Crédit Agricole, la Société Générale et BNP Paribas), grandes entreprises publiques (SNCF), entreprises de distributions (Carrefour, Décathlon), fournisseurs d’énergie (ENGIE, EDF), fleuron de l’industrie (Danone, Renault), groupes d’assurance (Maif), leader de la construction (Vinci) ou encore groupes internationaux tels que L’Oréal ou LVMH, sont ainsi amenés à publier une DPEF obligatoire en 2023 pour l’exercice 2022. Bien que réglementaire dans certains cas, le rapportage extra-financier peut également se révéler un atout pour des plus petites structures.

Qui contrôle la Déclaration de performance extra-financière (DPEF) ?

Les Organismes Tiers Indépendants (dits OTI), agréés par l'Autorité des marchés financiers (AMF), sont chargés des contrôles. Ces instances émettent un avis positif si aucune anomalie significative n’a été relevée. En revanche, leur avis sera “réservé”, dans le cas où il existe un doute sur la conformité ou la sincérité de la déclaration. Il sera négatif si la conclusion de la déclaration lui semble improbable.

TPE, startups, PME : pourquoi réaliser une Déclaration de performance extra-financière (DPEF) ? 

Si aucun texte de loi n’oblige une PME, TPE et/ou startup à réaliser une déclaration de performance extra-financière, une telle publication à l’initiative de l’entreprise peut être bien perçue. Nous revenons sur les raisons qui peuvent inciter une entreprise à publier une DPEF, même si cette dernière n’est pas assujettie à cette réglementation.

Piloter sa croissance de manière durable

En analyser sa performance extra-financière, une entreprise se donne la capacité d’identifier plusieurs éléments : 

  • son delta d’amélioration pour prendre des engagements concrets, améliorer sa stratégie RSE et en mesurer les résultats ; 
  • les opportunités liées à ces sujets, en développant un avantage concurrentiel ou un perfectionnement de sa marque employeur ;
  • les menaces pesant sur l’entreprise (notamment d’un point de vue climatique).

Il est par ailleurs important de savoir que ce document est très prisé par les investisseurs : il représente aujourd’hui une matrice d’aide à la décision incontournable. Il est également considéré comme un outil de pilotage optimal pour orienter et transformer son organisation, puisqu’y sont déclinées les différentes stratégies de l’entreprise : financières et RSE.

Anticiper la réglementation CSRD

D’ici à 2027, on estime que près de 50 000 entreprises européennes seront concernées par la Corporate Sustainability Reporting Directive (ou CSRD – ajouter un lien vers le dossier), qui élargit son scope aux entreprises de plus de 250 salariés (et non plus seulement aux grandes entreprises de plus de 500 salariés).

Pour anticiper ce mouvement de renforcement de la législation en matière de reporting extra-financier, les entreprises françaises peuvent d’ores et déjà se familiariser avec le DPEF, dont certaines informations seront utiles lorsque la CSRD entrera en vigueur. 

Communiquer de façon responsable sans greenwashing

Un reporting extra-financier réalisé alors même qu’il n’est pas obligatoire est un élément fort de réassurance quant à la sincérité de la politique RSE de l’entreprise. Les clients, salariés, talents à recruter, partenaires commerciaux, de plus en plus en demande de transparence sur l’impact social et environnemental des entreprises, pourront en effet être satisfaits de la prise de conscience et de l’engagement de l’entreprise à gommer certains aspects négatifs de son activité, en toute transparence.

Comment mettre en œuvre la DPEF dans son entreprise ? 

Selon la loi, la DPEF doit comporter au moins les trois éléments suivants : une description des risques liés à l'activité de l'entreprise, les politiques mises en place pour les prévenir, les identifier et atténuer la survenance de ces risques, et les résultats de ces dernières (appuyés par des indicateurs clés de performance, ou "ICP").

Plusieurs données se révèlent en effet indispensables pour rédiger un rapportage extra financier complet. 

Mentionner dans ce reporting extra-financier des informations sur l’entreprise 

Pour présenter un rapport extra-financier complet, les entreprises doivent mentionner le modèle d’affaires, les risques, les indicateurs et périmètres associés ainsi que les politiques de diligence pour les quatre catégories d’informations suivantes : 

  • les conséquences sociales et/ou sociétales (emploi, organisation du travail, santé et sécurité, relations sociales, formation, égalité de traitement, engagement pour le développement durable, sous-traitance et fournisseurs, loyauté des pratiques) ;
  • les conséquences environnementales (politique environnementale, pollution, économie circulaire, utilisation durable des ressources, changement climatique, protection de la biodiversité) ;
  • le respect des droits de l’Homme (pour les entités cotées et assimilées) ;
  • la lutte contre la corruption.
Bon à savoir :
S’il manque une des catégories, l’État peut procéder à un rappel à l’ordre. À minima, l'entreprise doit justifier pourquoi elle n’a pas développé cette catégorie dans son rapport.

Rédiger une DPEF de manière efficace 

Une fois le périmètre du rapport établi, il est conseillé de constituer une équipe dédiée en interne pour la rédaction du rapport. Cette dernière devra être à même d'appréhender les rouages du business model de l'entreprise (comptabilité, finance, stratégie marketing, etc.) et de travailler sur les leviers et les indicateurs indispensables au reporting. 

De nombreuses références peuvent être des sources d’inspiration, à l’image des lignes directrices publiées par la Commission européenne. Ces dernières recensent les indicateurs clés tels que proposés par la Task force on Climate-related Financial Disclosures (TCFD) ou les modèles proposés par la Global Reporting Initiative (GRI), le Sustainability Accounting Standards Board (SASB) et le Climate Disclosure Standards Board (CDSB). À noter que ces référentiels présentent par ailleurs différents outils de mesure de la performance environnementale, tels que le bilan carbone sur les scopes 1, 2 et 3.

Enfin, les entreprises doivent privilégier la concision et l’accessibilité dans le langage. Il faut se souvenir que l'ensemble des parties prenantes doivent comprendre ce rapport.  

Communiquer sur sa performance extra-financière

Légalement, cette déclaration doit être intégrée au sein du rapport de gestion annuel de l’entreprise et publiée sur le site internet de l'entreprise concernée. Toutefois, les entreprises ont la possibilité d’organiser un événement ou de profiter de la sortie des performances non financières pour susciter le débat et impliquer toutes leurs parties prenantes.

Le conseil en plus ?
Communiquer régulièrement sur le respect des engagements pris et les progrès réalisés dans la réduction des impacts de l’entreprise.


Sources
Le rapportage extra-financier des entreprises, Ministères Écologie Énergie Territoires 
Déchiffrer la déclaration de performance extra-financière pour investir de manière responsable en direct en actions, AMF
Décret n° 2017-1265 du 9 août 2017 pris pour l'application de l'ordonnance n° 2017-1180 du 19 juillet 2017 relative à la publication d'informations non financières par certaines grandes entreprises et certains groupes d'entreprises, Legifrance