Déshydratation des aliments : comment Dry4Good met la tech au service du goût

Fondée par Jean-Gabriel Dijourd et Romaric Janssen, la foodtech Dry4Good se spécialise dans la déshydratation des aliments pour l’industrie agroalimentaire. Un procédé souvent méconnu qui offre toutefois de nombreux bienfaits. Découverte. 

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Dry4Good foodtech
® Dry4Good - Jean-Gabriel Dijourd (à gauche) et Romaric Janssen (à droite)

Soutenir les agriculteurs et accompagner les agroindustriels dans la conception de produits de qualité tout en luttant contre le gaspillage alimentaire ? Et si tout cela était rendu possible grâce à la déshydratation des aliments. « C’est un métier de conserve », déclare d’emblée Romaric Janssen, le cofondateur de Dry4Good. Cette start-up basée à Cergy (95) se spécialise dans cette pratique propre au domaine de l’agroalimentaire. Bien que novatrice dans ses procédés, la foodtech s’appuie en réalité sur une technique de conservation pas si nouvelle : « cela remonte aux origines de la production agricole dans le monde entier », détaille l’entrepreneur. 

Il faut dire que la conservation des aliments représente un vrai enjeu, au-delà même des frontières de l’Hexagone. En 2019, la Commission européenne instaurait un cadre commun de surveillance obligatoire des déchets alimentaires pour les pays membres, afin de « mieux lutter contre le gaspillage ». Avec 8,764 millions de tonnes de nourriture gâchée en 2021 (ministère de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire), la France se situe dans la « moyenne ». Si près de la moitié est directement causée par les ménages, l’industrie agroalimentaire elle, compte malgré tout pour 20 % du gaspillage, devançant de peu la production primaire (14 %). Pour Romaric Janssen, la déshydratation représente une partie de la solution : « on est là pour stabiliser les produits et éviter qu’ils ne s’abîment ou ne périment. » 

Déshydrater pour mieux exister 

Pratique agricole ancestrale, la déshydratation des aliments consiste à ôter l’eau qu’ils contiennent. « Le fait de retirer cette fraîcheur les empêche de se dégrader, autrement dit, d’avoir une prolifération microbienne », explique le créateur de Dry4Good. « En moyenne, les fruits et légumes contiennent 90 % d’eau. Leur transport est onéreux, et la marchandise se détériore plus facilement. D’un point de vue écologique comme économique, ce n’est pas très rentable pour la filière industrielle de s’approvisionner en produits frais », poursuit-il. 

La foodtech, qui propose essentiellement des poudres en sortie d’usine, se spécialise néanmoins dans un procédé bien particulier de déshydratation. Dry4Good pratique le séchage à pression partielle, c’est-à-dire presque sans oxygène, tout comme la lyophilisation, et en évitant de trop chauffer le produit (entre 30 et 35°C). « Le séchage modifie légèrement l’aspect des denrées alimentaires, comme le goût, la couleur, ou la concentration en nutriments et en vitamines. Avec notre technique "sous vide" et à basse température, on s’assure de moins dégrader la nourriture », explique Romaric Janssen.  

De quoi se positionner comme un fournisseur de qualité auprès des industriels de l’agroalimentaire. En effet, le secteur a fortement recours aux ingrédients chimiques car plus abordables et conservables, bien que ces derniers aient un impact reconnu sur la santé et l’organisme (étude du Sénat, 2023). « Comment faire pour préserver la gourmandise, l’attrait, et le prix ? questionne le dirigeant de la start-up. Il faut innover dans la technique. C’est pourquoi nous avons souhaité mettre la mécanique, et non la chimie, au service de l’ingrédient ».  

Devenir le partenaire de ses clients et fournisseurs 

En plus de pouvoir approvisionner les agroindustriels en matière première saine et naturelle – limitant ainsi l’ajout d’intrants controversés comme les exhausteurs de goût ou certains colorants – Dry4Good agit au niveau agricole local. « Pour nous, le lien avec les agriculteurs est fondamental», affirme Romaric Janssen. De fait, la jeune pousse peut acheter aux paysans leurs produits « déclassés », c’est-à-dire en fin de vie ou ne répondant pas aux critères des distributeurs, pour la déshydrater et la revendre derrière sans perdre en qualité nutritionnelle. « Cela nous permet d’acquérir notre matière première à moindre coût, de payer les agriculteurs pour une marchandise qu’ils ne pouvaient plus vendre, et de limiter ainsi le gaspillage ». 

Aujourd’hui, la foodtech possède un site de transformation dans le Val d’Oise et privilégie les circuits courts, en bio comme en « conventionnel ». Elle œuvre coûte que coûte pour la récupération des invendus agricoles et contribue ainsi à la dynamique économique locale. « Quand on aura une capacité de production plus importante, on se mettra à produire pour stocker. Cette notion sera à la fois un enjeu financier et une opportunité, car cela nous permettra d’acheter à un moment où les agriculteurs ont trop de matière, et revendre à un moment où ce n’est pas la saison », conclut le chef d’entreprise. 

elc
Emma-Louise Chaudron Rédactrice Web