Agriopale, de la valorisation de biomasse à l’énergie verte

L’entreprise familiale des Hauts-de-France a toujours évolué depuis sa création il y a 25 ans, révélant des tendances de marché en faveur de la sobriété : valorisation de déchets agricoles, compostage, puis méthanisation et biogaz ces dernières années. Portrait d’Agriopale, une entreprise innovante. 

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Agriopale, de la valorisation de biomasse à l’énergie verte

Agriopale est une entreprise familiale fondée en 1999 par deux familles d'agriculteurs en Côte d’Opale (Pas-de-Calais) et membre de la communauté du Coq Vert de Bpifrance. Elle est spécialisée depuis sa création dans la valorisation de la biomasse comme les résidus végétaux, le bois ou encore les sous-produits de l’industrie agroalimentaire. Créée à l’origine à partir d’un besoin spécifique - valoriser le fumier de cheval d’un centre équestre local - cette activité s’est étendue et l’entreprise gère aujourd’hui 11 plateformes de compostage traitant environ 140 000 tonnes de compost par an. “Principalement des déchets verts issus de communautés de communes”, précise Vincent Dusannier, chargé d’affaires bois énergie de l’entreprise. En effet, par effet de rebond de la loi Voynet de 1999 rendant obligatoire la valorisation des déchets verts des collectivités, l'entreprise a remporté de nombreux contrats de recyclage. 

Le virage vers la méthanisation des déchets 

En 2010, Agriopale engage une première diversification en construisant une unité de méthanisation à Saint-Josse-sur-Mer, devenant ainsi “à son ouverture en 2015, la première unité de méthanisation à injection dans le Pas-de-Calais”, détaille Vincent Dusannier. Par injection, on entend purification du gaz et injection directe dans le réseau gaz de ville. Agriopale a étendu son réseau et compte actuellement 8 méthaniseurs en France et un nouveau en construction au nord de Lyon. L’entreprise a décidé de concentrer ses sources d’approvisionnement uniquement sur les déchets d'industries agroalimentaires et d’exclure l’incorporation de cultures agricoles, “c’est plus pertinent sur le plan environnemental.” En offrant un débouché pour les industriels de plusieurs régions de France, Agriopale s’assure de valoriser un déchet pour produire de l’énergie verte, et développe une expertise sur la massification des méthaniseurs : “La production de méthane est bien atomisée en France et beaucoup d’installations sont détenues par des agriculteurs, salue M. Dusannier. Nous avons fait le choix de développer plusieurs unités afin de faciliter la maintenance et de mettre en commun les compétences internes et les gisements de déchets. En effet, il est important d’atteindre une taille critique pour répondre aux besoins de nos partenaires industriels.” 

Une diversification avec le bois énergie accompagnée par Bpifrance 

En plus du compostage et de la méthanisation, Agriopale s'est lancé dans la production de bois énergie. Sur son nouveau site de Feuquières-en-Vimeux, dans la Somme, qui entrera en exploitation en avril 2024, elle produira 25 000 stères de bois par an. L'entreprise transforme des grumes en bûches et utilise des séchoirs pour stabiliser le bois et améliorer ses performances énergétiques. “Cela permet d’obtenir des produits très secs, avec une meilleure performance énergétique, de l’ordre de 30 %” explique Vincent Dusannier. Cela répond au besoin d’avoir un produit standardisé et normé, avec une certification ISO 9001 en cours d’obtention.” Bpifrance a accompagné de manière significative le bouclage financier de ce projet de production de bois énergie, à la fois en subvention (équivalent à 9 % du coût du projet) et en prêt (43 % du coût du projet). 

Les stations multi-énergies : le BioGNV comme carburant alternatif 

Enfin, Agriopale a également développé des stations multi-énergies, proposant du Biométhane Naturel pour les véhicules (BioGNV) avec des garanties d’origine pour certifier que le gaz est produit sur une unité du groupe. Ce BioGNV sert comme carburant pour les transporteurs locaux, ainsi que d'autres alternatives comme le B100 (intégrant du colza), mais aussi des bornes électriques ou du gasoil : “Nous ne fermons la porte à aucune énergie, le but est d’accompagner les transporteurs dans leur transition.” Trois stations sont ouvertes à ce jour (Arques dans le Pas-de-Calais, Abbeville dans la Somme et Saumur dans le Maine-et-Loire), une quatrième ouvrira bientôt à Arras et l’objectif est de parvenir à 10 stations dans les années qui viennent. Ces stations permettent de réduire les coûts de transport et d'améliorer le bilan carbone des transporteurs, acteurs logistiques ou collectivités (transports en commun). 

Un modèle de coopération vertueux entre industriels et agriculteurs 

Agriopale s'efforce de développer de nouvelles synergies pour la valorisation des déchets organiques et la décarbonation du transport industriel. L'entreprise est fortement attachée à ses valeurs agricoles et travaille en étroite collaboration avec les agriculteurs locaux, certains étant directement associés aux plateformes de compostage et aux méthaniseurs. Ces entreprises constituent une diversification des activités et un revenu complémentaire pour les agriculteurs qui abritent les plateformes, et pour les autres un moyen d’obtenir des engrais naturels et locaux pour leurs champs et parcelles. “Pour la méthanisation c’est le même processus, ajoute M. Dusannier. Une fois que le gaz a été absorbé, le digestat a des propriétés fertilisantes très bonnes et peut se substituer à certains engrais chimiques.” 

Ce travail de coopération de territoire est réalisé tant du côté de l’offre que de celui de la demande : “Notre ADN, c’est de réaliser des projets de territoires avec les agriculteurs et des acteurs locaux comme les collectivités locales et des industriels.” Par exemple, ajoute Vincent Dusannier, “nous lançons un nouveau projet de station BioGNV en nous associant avec des acteurs locaux qui ont une flotte de véhicules pour assurer une viabilité économique minimum à l’ouverture du projet.” 

L’innovation pour accompagner la transition 

Agriopale fait preuve d'innovation dans la valorisation de la biomasse et la production d’énergies renouvelables. En un quart de siècle, l’entreprise est devenue un acteur territorial important de la transition énergétique et de la production d'énergie issue de déchets agricoles. Et elle prépare l’avenir, avec un projet pilote de valorisation des matières fibreuses (bois, paille) à des fins de méthanisation, plus difficiles à dégrader actuellement. Cette solution permettrait de lever le frein de l’accès aux gisements de matière, “en ayant accès à un potentiel de matière qui est jusqu'alors mal valorisé.” Le soleil brille sur la Côte d’Opale ! 

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