Comment bien gérer sa fusion-acquisition ?

Pour Big média, Marc Irisson, associé fondateur de Translink Corporate Finance, conseil en fusions et acquisitions, décrypte le monde de la fusion-acquisition et partage quelques conseils afin de mieux vivre ces périodes de transition. 

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Comment bien gérer sa fusion-acquisition ?

Chaque année en France, des centaines d’entreprises se lancent dans des opérations de fusion, d’acquisition ou de cession de leur entreprise. Pour aider les dirigeants à s’y retrouver, des cabinets de conseils comme Translink CF interviennent à leurs côtés. « Notre métier est d’accompagner des dirigeants d’entreprises et actionnaires dans l’ensemble de leurs problématiques de bilan qui touchent au capital, dans des contextes d’opérations de cession ou d’acquisition », explique Marc Irisson, associé fondateur de Translink CF. Pour Big média, il éclaircit quelques points sur le large domaine de la fusion-acquisition et partage quelques conseils pour mieux vivre ces périodes de transition. 

Quelle différence existe-t-il entre la fusion et l’acquisition ?  

Le terme de “fusion-acquisition” couvre deux réalités différentes. On parle d’acquisition quand une entreprise procède à un rachat numéraire. Lorsque l’on acquiert une société, on peut la payer de différentes manières, en numéraire, en cash ou faire appel à des financeurs tiers comme des fonds de private equity.”, précise ainsi Marc Irisson. 

La fusion intervient lorsqu’une entreprise achète une autre société en payant l'acquisition en titres ou lorsque deux entreprises de tailles égales se rapprochent. “Une autre manière d’acheter une société consiste à payer en titres l'acquisition. Il s’agit de rémunérer les actions de la cible en actions de sa propre société. On parle ici de fusion car on va véritablement fusionner les entreprises et les actionnariats., explique l’associé fondateur de Translink CF. Avant de continuer : Lorsque l’on a deux entreprises de tailles égales qui se rapprochent, on parle d’office de fusion. On ne peut pas dire qu’il y en ait une qui prenne le pas sur l’autre en termes de taille ou de culture d’entreprise. L’objectif, ici, est plutôt de fusionner un ensemble plutôt que d’avoir un acheteur et un acheté. De plus, il y a souvent beaucoup d’égo chez les dirigeants d’entreprises cotées qui préfèrent parler d’une fusion entre égaux plutôt que de parler de rachat de l’un par l’autre.

Pourquoi envisager la fusion, la cession ou l’acquisition ? 

Le saviez-vous ? 81 % des dirigeants ont déjà envisagé de racheter une entreprise (lien vers : 81 % des dirigeants ont déjà envisagé de racheter une entreprise). Alors, quels sont les enjeux d’une fusion-acquisition ? Il faut, pour répondre à cette question, faire une distinction entre les acquéreurs et les entreprises qui se font racheter.

Quelles sont les raisons qui motivent des dirigeants à acquérir une autre société ?

Pour une industrie qui se porte acquéreur, les enjeux diffèrent selon les types de fusion acquisition.Du côté les industries, la fusion ou l’acquisition peuvent représenter une opportunité d’augmenter leur capacité de production, d’agrandir leur parc de clients, de rapprocher leurs unités de production, de s’exporter ou bien d’acquérir une technologie nouvelle”, détaille Marc Irisson. “Il y a aussi des logiques plus destructrices comme éliminer un concurrent qui prend de l’ampleur”. 

Une entreprise de service visera davantage un objectif RH. Dans le cas des entreprises de services, la fusac permet de récupérer des salariés qualifiés qui vont renforcer les effectifs de la société sur un virage qu’elle aurait peut-être manqué, indique le consultant.

Acquérir une entreprise en fusac pour s’inspirer du fonctionnement des plus petites structures

L'acquisition d’une entreprise de plus petite taille comporte également un avantage en matière de d’organisation interne. Ainsi, les dirigeants des plus grosses structures vont pouvoir s’inspirer de l’agilité des TPE, PME ou ETI. Souvent, la crainte des dirigeants de PME et ETI est que la lourdeur de process des grands groupes vienne dégrader les performances ou faire fuir les équipes avec un sentiment de perte d’autonomie et de réactivité.”, note Marc Irisson. “In fine, les acquéreurs font tout de même preuve de bon sens lorsqu’ils observent un process qui fonctionne bien dans une entreprise, ils vont essayer de le reprendre et de le diffuser au niveau du groupe.

Rachat d’entreprise : pourquoi faire de la fusion et acquisition ? 

Pour le cédant, les motifs qui amènent un dirigeant à entrer dans un processus de cession de son entreprise sont multiples et d’un tout autre ordre.La cession peut témoigner de la volonté du dirigeant de prendre sa retraite, ou alors parce qu’il a envie d’entreprendre à nouveau.”, avance Marc Irisson. “Dans de nombreux cas, on note que les chefs d’entreprises ont atteint un plafond de verre et sentent qu’il serait plus bénéfique pour l’entreprise et les équipes qu’une autre personne prenne la suite. Lorsqu’il y a de nombreuses opportunités sur le marché, il est préférable de se retirer et de débloquer son actif avant que cela ne devienne moins optimal.

Quels sont les points d’attention avant d’envisager une fusion-acquisition ? 

Dans le cadre cession pure et simple d’une PME ou ETI à un grand groupe, le cédant devra être attentif quant à la mise à niveau de son entreprise par rapport aux standards de l’acquéreur. Les sujets tels que les plans de rémunération, les rémunérations en elles-mêmes, les syndicats ou encore le fonctionnement du CSE devront donc faire l’objet d’un véritable travail de préparation et d’anticipation, afin que le dirigeant ne soit pas dépassé par tous les efforts à fournir pour arriver au standard. 

Marc Irisson remarque : Une petite entreprise fonctionne généralement à l’image de son dirigeant. Ce sont aussi et surtout des sociétés agiles, avec des schémas de décision plus courts, mais qui ne sont pas forcément encore familiarisées avec tous les outils de mesures de performance que peut exiger un grand groupe. 

L’attitude des chefs d’entreprises qui revendent leur société et doivent se retirer de la direction est également un point de vigilance. La vie d’entrepreneur n’est pas un long fleuve tranquille, mais s’il y a une chose à laquelle les entrepreneurs tiennent plus que tout, c’est leur liberté d’action, de décision, etc. Dans le cadre d’une opération où l’entreprise est intégrée au sein d’un plus grand groupe, ou même chez un confrère, il faut qu’il y ait une convergence sur la volonté, pour le cédant, de sortir de la direction et de laisser les rênes à une nouvelle personne ou au dirigeant de l’autre entreprise. Il y a forcément des questions d’égo, de l’affect. Il y a un sentiment naturel de se dire « moi je n’aurais pas fait comme ça ». Cependant, ce n’est pas parce qu’une personne fait différemment qu’elle fait moins bien. Il y a une phase d’acceptation.

Deux conseils pour bien préparer une opération de fusion-acquisition

Conseil 1 : organiser le départ du dirigeant de la société cible

Il convient donc de planifier cette transition au niveau de la direction : Avec Translink, l’entreprise dans laquelle je travaille, nous conseillons de mettre les choses au clair avec l’acquéreur sur les rôles de chacun et notamment du dirigeant sortant”, explique ainsi Marc Irisson. Cela permet de minimiser les frustrations car du côté de l’acquéreur, ce n’est pas agréable d’avoir toujours quelqu’un qui passe derrière, surtout lorsque, historiquement, cette personne est la figure emblématique de la société. De plus, ce phénomène pose problème pour embarquer les équipes dans le nouveau projet.”  

Il ajoute : Cela ne veut pas dire que le dirigeant de l’entreprise rachetée doit partir vite, au contraire. Il faut accepter qu’on ne puisse pas vendre sa société et partir du jour au lendemain car c’est risqué pour la société en elle-même et pour l’acquéreur. S’il a un attachement aux équipes, ce n’est pas une chose à faire. Ce n’est pas parce que l’on vend à un tiers qu’il ne faut pas mettre en place un management de transition afin de réduire la dépendance au dirigeant. Il faut de 12 à 24 mois pour mettre en place un nouveau management et qu’il soit opérationnel.” 

Conseil 2 : Susciter l’engagement des équipes au bon moment

Enfin, il est nécessaire d’embarquer les équipes dans ce nouveau projet… au moment voulu ! Il faut savoir que c’est une obligation légale d'informer les salariés d'une société en cas de changement de contrôle, et ce avant la signature finale de l'opération. Cela peut passer par le biais d’un CSE (comité social et économique, NDLR) en fonction de l’organisation sociale de la société. La législation française impose même de proposer aux salariés de racheter la société, rappelle le consultant.Toutefois, comme on touche à des opérations confidentielles avec des enjeux business forts, la discrétion est de mise.”.

Informer tous les collaborateurs au début du processus comporte en effet des risques, notamment de divulgation involontaire d’informations utilisées contre la société. Les opérations ne sont jamais garanties, la prudence reste donc de mise.” renchérit Marc Irisson. “Si les choses ne se font pas et que toute l’entreprise était au courant, il peut y avoir des dommages collatéraux. Il faut trouver un équilibre entre le business et l’humain. Ce n’est pas une question de non-considération des équipes, mais de culture en France par rapport à ce sujet.”. 

Aussi est-il conseillé de réfléchir aux personnes indispensables à mettre dans la confidence, dans la mesure où un dirigeant ne peut pas gérer un processus seul de A à Z, en termes de volumétrie d’informations à traiter. “Une bonne opération de fusion-acquisition se prépare également avec les bons avocats conseil.”, souligne l’associé fondateur de Translink Corporate Finance. “Le service juridique habituel de l’entreprise n’est pas forcément armé pour gérer les enjeux d’une opération de fusion-acquisition. Il faut bien s’entourer, prendre le temps, réfléchir à ce qu’on veut et à ce que l’on est prêt à accepter ou non.

On conseillera donc aux acteurs d’une fusion acquisition de recourir à l'accompagnement de spécialistes, au premier rang desquels les cabinets conseil en fusion-acquisition. Un cabinet de gestion de patrimoine, un cabinet d’audit ou un banquier d’affaires pourront également être de bons conseils.

FAQ Fusion-acquisition

Qu’est-ce qu’une opération de fusion-acquisition d'entreprise ? 

Également appelée “M&A, Mergers and Acquisition” en anglais, la fusion-acquisition, ou fusac, est une opération juridique consistant à regrouper deux sociétés par une opération de rachat d'entreprise ou de prise de participation. Celle-ci peut être hostile ou amicale. Au terme de cette opération, les deux entreprises ne font plus qu’une : les actifs et passifs de la société venderesse ont été transmis à la société acheteuse. Cette dernière prend le contrôle juridique de la société vendue, sans que celle-ci ne soit absorbée pour autant, les deux entités juridiques subsistant.

Fusion-acquisition et fusion-absorption : quelle différence ?

Comme la fusion-acquisition, la fusion-absorption vise à contrôler totalement ou partiellement une autre entreprise. Néanmoins, elles divergent d’un point de vue juridique. Dans le cadre de la fusion-absorption, la société venderesse transmet son patrimoine à la société acquéreuse : la société absorbante. 

De cette fusion naît une seule et même entité juridique : les sociétés absorbées sont dissoutes sans liquidation, tandis que la société absorbante garde sa personnalité morale.

Quelles sont les étapes du processus de fusion-acquisition ?

Généralement, un projet de fusion-acquisition suit quatre étapes : 

  • la phase de préparation, composée d’une phase de diagnostic et de l’élaboration d’un plan d'acquisition ; 
  • la phase de négociation, durant laquelle la société acquérante prend contact avec la société qu’elle souhaite acheter et négocie les conditions de l’opération avec cette dernière ; 
  • la phase d’intégration, qu’il est nécessaire de planifier en tenant compte des bouleversements induits.

Les différents types de fusion-acquisition d’entreprises et leurs exemples

Plusieurs cas de figure se présentent dans le cadre d’une fusion-acquisition, qui se divisent en trois types. 

La fusion-acquisition horizontale

Ce type de fusac se rencontre quand l’acquéreur achète une ou plusieurs entreprises dont l’activité est complémentaire à la sienne. Elle permet, si elle est bien réalisée, des économies d’échelle et une augmentation des parts de marché.

Imaginons par exemple une société proposant des yaourts au lait de vache, qui absorbe une société préparant des yaourts au lait de chèvre et une autre dont la spécialité se trouve être les yaourts à base de lait végétal.

Fusion-acquisition verticale

Dans cette configuration, la fusion acquisition sert à prendre en partie le contrôle d’une filière économique grâce au rachat du leader puis des diverses entreprises suivantes. Cette stratégie agressive a pour but d’éliminer la concurrence. 

Avec cette stratégie, le producteur de yaourt au lait de vache essaierait de prendre le contrôle du leader de ce secteur.

Fusion-acquisition conglomérale

Une telle fusac concerne les conglomérats désireux de diversifier leurs activités, en opérant le rachat de leaders de divers secteurs. 

Par exemple, le producteur de yaourt prend des participations dans la production de méthane vert afin d’investir un secteur d’avenir et d’en devenir l’un des futurs poids lourds. 

Quels sont les avantages d'une fusion acquisition ? 

Une fusion-acquisition présente cinq bénéfices pour les entreprises concernées : 

  • agir en faveur d’une amélioration du chiffre d’affaires de la société et/ou diversifier les activités de l'entreprise sur une même verticale d’activité ou sur des verticales parallèles (logique de croissance externe) ; 
  • réduire les coûts et créer des économies d’échelle ; 
  • augmenter leur part de marché avec le rachat d’un concurrent implanté dans une zone géographique non couverte jusque-là par exemple ; 
  • récupérer la trésorerie excédentaire d’une société concurrente sur un marché mature, pour investir dans de nouvelles activités sans mobiliser ses actionnaires ; 
  • payer moins d’impôts sur le bénéfice.

Sources : 

https://www.legifrance.gouv.fr/codes/section_lc/LEGITEXT000005634379/LE…

​​https://entreprendre.service-public.fr/vosdroits/F36061

https://www.urssaf.fr/portail/home/employeur/creer/la-modification-de-l…

 

Julie Lepretre
Julie Lepretre Rédactrice web