Entretien avec Yanis Gannouni [CNJE], « Il y a quelque chose de galvanisant dans l’esprit Junior-Entreprise »

Comme tous les ans, la gouvernance de la confédération nationale des Junior-Entreprises (CNJE) change de mains. À l’occasion de cette rentrée universitaire, Yanis Gannouni le président du mouvement revient sur son début de mandat et sur les enjeux auxquels font face les juniors-entrepreneurs. 

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Yanis Gannouni, président de la CNJE (2022-2023)
(dr) Yanis Gannouni

Âgé de 23 ans et en master à TBS (Toulouse Business School), Yanis Gannouni n’est plus tout à fait un étudiant ordinaire. Depuis le 28 juillet dernier, il est à la tête de la CNJE : une structure qui fédère plus de deux cents associations sur l’ensemble du territoire. Simplement, le plus grand mouvement étudiant français. Copie quasi-conforme des entreprises commerciales, ces associations à portée pédagogique ont vocation à faire vivre l’expérience entrepreneuriale dès les études supérieures. Développement interne et international du mouvement, relations institutionnelles, partenariats commerciaux avec de grands groupes, le mandat de Yanis Gannouni s’annonce riche. Interview. 

« On veut devenir accessible à 100% des étudiants français » 

Big Média : Quelles sont tes missions en tant que président de la CNJE ? 

Yanis Gannouni : La CNJE est une association qui comprend une équipe de trois salariés et d’environ vingt-cinq bénévoles qui nous accompagnent sur leur temps libre, ma mission est donc d’abord managériale. Pour la réaliser, je suis heureusement accompagné par Marie Trüb, la vice-présidente de la CNJE. Ensemble, on pilote la stratégie du mouvement qui court sur la période 2020 - 2024, assure le développement du modèle en interne, avec l'ambition d’enrichir l’expérience junior-entrepreneur. 

Un autre aspect de la mission est plus relationnel. Nous travaillons avec de nombreuses institutions, ministères et établissements d’enseignement supérieur dans le but de promouvoir les intérêts des juniors-entrepreneurs. On prône un aménagement des emplois du temps et cycles d’études, afin qu’ils s’adaptent à l’investissement temps que demande le travail dans une Junior-Entreprise (JE). D’un autre côté, on fait le nécessaire pour montrer que nous proposons un modèle d’avenir pour l’enseignement. Enfin, il y a les relations avec les entreprises privées, que ce soit dans le cadre des partenariats (ndlr, de grandes entreprises : Alten, Engie, EY, BNP Paribas, sont partenaires de la CNJE) ou dans la valorisation du modèle auprès de clients potentiels. 

BM : Comment fait-on pour créer une Junior-Entreprise ? 

YG : Généralement, il s’agit d’étudiants qui entendent parler du mouvement, trouvent le modèle intéressant et décident de se lancer. Dans ce cas de figure, la démarche entrepreneuriale est totale. Ils se mettent à réfléchir à leur modèle pour proposer une offre commerciale en lien avec les enseignements qu’ils reçoivent, puis contactent la CNJE. Un de nos pôles est dédié à l’accompagnement des nouvelles structures, et va guider l’association naissante le temps que cette dernière devienne pérenne. 

Dans certains cas, il arrive aussi que la volonté de création d’une structure vienne directement d’une école. Alors on se déplace pour présenter notre modèle aux étudiants. Mais la règle d’or qu’on s’est fixée, c’est que chaque projet doit être porté par une volonté de rejoindre le mouvement. À terme, on veut devenir accessible à 100% des étudiants français et que tous aient le choix de rejoindre, ou non, la JE de leur établissement d’enseignement supérieur. 

BM : Comment la CNJE intervient-elle pour assurer un niveau de prestation satisfaisant sur l’ensemble de son réseau ? 

YG : C’est le grand challenge. La solution que nous avons choisie passe par des audits annuels de l’ensemble des structures du réseau. Le statut JE est exigeant, et les associations étudiantes mettent des années à l’obtenir. Concrètement, l’année dernière 164 « Auditeurs-Conseil » sélectionnés par concours au sein du réseau Junior-Entreprises ont réalisé 226 audits. Lors de ces derniers, c’est le respect du cadre légal, la qualité du suivi client et le nombre de missions qui sont inspectés. Elle-même, la qualité du contrôle est assurée par un concours sélectif où seuls 7 % des candidats sont sélectionnés. Ce système représente une vraie garantie pour l’entreprise qui décide de traiter avec une Junior-Entreprise. Force est de constater que ça fonctionne, le mouvement en est à sa cinquante-quatrième année d’existence. 

«Tous les ans la quasi-totalité des effectifs d'une JE sont remaniés»

BM : Pourquoi est-il nécessaire que le contrôle des Junior-Entreprises se fasse tous les ans ? 

YG : C’est lié à une des spécificités de notre modèle. Tous les ans, la quasi-totalité des effectifs d’une JE sont remaniés. Il s’agit d’une contrainte très lourde, et sans équivalent dans le monde de l’entreprise. La passation est donc d’autant plus cruciale pour l’organisation que, tous les ans, les associations risquent de perdre en informations et en compétences. Les audits sont donc un gage attestant que les structures continuent de se développer et que la qualité reste satisfaisante. D’où leur contrôle annuel. 

D’un autre côté, notre responsabilité à la CNJE est de tout mettre en œuvre pour faciliter ces passations et le développement des associations membres. L’intranet de la CNJE permet aux associations du réseau et celles qui souhaitent nous rejoindre d’avoir accès à de nombreuses ressources indispensables à la gestion d’une Junior-Entreprise. Plusieurs fois par an, lors de congrès régionaux, nos équipes et les entreprises partenaires du mouvement mettent en place des formations et modules visant à la montée en compétences des juniors-entrepreneurs. Enfin, les associations souhaitant être labélisées sont parrainées par des JE bien établies, ce qui facilite leur développement. 

BM : Le mot de la fin ? 

YG : Pour moi, la longévité du mouvement (ndlr, 54 ans), ne s’explique pas uniquement par l’existence de processus. Il y a quelque chose de galvanisant dans l’esprit du mouvement, et ce qu’il représente pour ceux qui y sont. Le modèle Junior-Entreprises est selon moi le meilleur créé dans l’enseignement français. Depuis sa création, on y retrouve des étudiants animés par la volonté de vivre une réelle expérience professionnelle en amont de la fin de leurs études. Tant que cette volonté vivra, les passations se passeront correctement et le mouvement se développera toujours plus. 

Martin Ferron
Martin Ferron Rédacteur Web