Le Costa Rica, une terre durable d’opportunités au centre de l’Amérique latine

Le Costa Rica est connu pour son mix énergétique quasiment entièrement durable et pour sa stabilité, qui lui vaut le titre de « Suisse de l’Amérique centrale ». Figure d’exemple en termes de réussite économique et durable dans la région, le pays continue d’attirer les investisseurs étrangers. Alexis Del Sale, directeur général d’Arkane Groupe, dont l’activité se concentre dans l’immobilier commercial et le nautisme, et Cyril Bagues, directeur de la CCI France Costa Rica, nous en disent plus sur cette terre d’opportunités.

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Costa Rica

En 1949, le Costa Rica décide de supprimer ses forces armées. C’est le premier pays à le faire dans un monde récemment marqué par son deuxième conflit mondial. Le gouvernement costaricien choisit à cette époque d’investir le budget militaire dans d’autres pans de son économie comme la santé et l’éducation. Des décennies plus tard, le pays d’Amérique centrale affiche un véritable dynamisme dans des secteurs technologiques de pointe comme les dispositifs médicaux, ou même dans les services. « Sur plusieurs générations, la population a eu accès à l’éducation gratuite et de bon niveau, formant une main d’œuvre qualifiée. Cela attire beaucoup d’entreprises venant du monde entier, qui délocalisent ici leurs fonctions de ressources humaines ou de comptabilité », indique Cyril Bagues, directeur de CCI France Costa Rica. 

Grand exportateur de fruits et de café, le pays bénéficie également d’une position centrale au cœur des Amériques, bordé par le Pacifique et les Caraïbes. C’est ce détail qui a attiré l’œil d’Alexis Del Sale, directeur général d’Arkane Groupe, qui exerce notamment dans les secteurs de l’immobilier commercial et le nautisme. C’est cette dernière activité que l’entrepreneur a choisi de développer au Costa Rica. « Ce sont des milliers de kilomètres de côtes, et le nautisme y est pourtant très peu développé. Les Costariciens sont en effet des montagnards à la base, ils ont développé la pêche comme activité alimentaire, les transports de nécessité sur les rivières, et il existe un peu de tourisme marin mais ça s'arrête là. On a choisi de nous implanter ici au long terme pour participer au développement nautique », explique l’entrepreneur, qui a lui-même découvert le pays d’abord comme touriste. 

L’écotourisme, une façon d’attirer l’attention sur le Costa Rica

En 2016, Alexis Del Sale tombe amoureux de la nature luxuriante et du mode de vie costariciens lors d’un voyage avec son père, fondateur de l’entreprise. Après plusieurs visites du territoire et de ses côtes ainsi qu’une étude du marché, l’étudiant devenu entrepreneur voit immédiatement le potentiel que le nautisme pourrait avoir dans ce pays qui attire jusqu’à trois millions de touristes par an. « J'ai eu l'opportunité de présenter notre projet Costa Rica Raid, une course de bateaux semi-rigide d’envergure mondiale, au ministère du tourisme costaricien. A travers notre événement sportif dédié aux passionnés de bateaux à moteur, le gouvernement voit l’opportunité de promouvoir le tourisme et d’attirer les investissements étrangers », estime Alexis Del Sale, aujourd’hui directeur général de l’entreprise. Pour lui, ce serait également une manière pour le gouvernement de diversifier l’origine des touristes, dans ce pays où près de deux tiers d’entre eux sont nord-américains. 

En 2013, le gouvernement met en place sa propre marque pays « Esencial Costa Rica » afin d’attirer les investissements étrangers et valoriser le secteur du tourisme, dans l’optique de dynamiser l’ensemble de son territoire. « Je dirais qu’il y a deux Costa Rica : un du centre, dans la capitale San José, qui est très tourné vers les services, et un rural, où il y a moins d’activité. Le tourisme vient contrer ça. C’est une activité en-dehors du centre, là où sont les plages, les volcans et les montagnes. C’est un secteur qui amène des opportunités pour ceux qui ne peuvent pas vivre dans la capitale », note Cyril Bagues, directeur de la CCI France Costa Rica. Et c’est bien le vert qui amènerait les touristes : l’ambassade du Costa Rica à Washington DC estime que 80 % des visiteurs se rendent au Costa Rica dans l’optique de réaliser des activités écotouristiques : canyoning, snorkeling, trek … Le pays, reconnu pour sa faune et sa flore hors pair, se distingue en effet comme un pionnier dans la protection de l’environnement.

Entre durabilité et fracture sociale, le Costa Rica un pays de contrastes

Depuis quelques années, le Costa Rica peut se targuer d’avoir une énergie quasiment entièrement produite de manière verte. « Ils ont cette possibilité grâce à d’importantes sources d’eau et des volcans. L’hydroélectrique et la géothermie constituent leur source majeure d’électricité, complétée par un peu d’éolien. On sait qu’il y a du pétrole ici, mais il est interdit d’extraire quoi que ce soit du sol », détaille Cyril Bagues. Alexis Del Sale constate aussi cette sensibilité écologique dans les gestes du quotidien : « Ils ne vont pas aussi souvent que nous acheter des bouteilles en plastique par exemple. Ils ont commencé à utiliser des gourdes bien avant pour limiter leur utilisation du plastique ». Le gouvernement cherche également à protéger son environnement précieux qui abrite à lui seul 6 % de la biodiversité mondiale : « En 1899 est fondée la United Fruit Company qui cultive massivement des bananes et des fruits. Cette culture a détruit un tiers des forêts en l’espace de cinquante ans. Heureusement, dans les années 60, des politiciens s’en sont inquiétés. Ils constatent que l’on risque de tout raser et construisent donc des réserves privées et parcs nationaux. On observe à partir de là une conscientisation politique de la conservation », relate Cyril Bagues. Aujourd’hui, les parcs nationaux représentent un quart du territoire du Costa Rica. 

Pour autant, tout n'est pas rose... ou plutôt vert pour le directeur de la CCI France Costa Rica. Il pointe d’ailleurs du doigt les inégalités croissantes : « Le Costaricien qui vit en dessous du seuil de pauvreté, il n’a que faire de tout ça et souhaite avant tout s’en sortir. Avec la fracture sociale grandissante, le Costa Rica devient aussi un pays de contradictions : il fait partie de ceux qui recyclent le moins au sein de l’OCDE. Certaines rivières sont parmi les plus polluées d’Amérique centrale, et beaucoup de stations d’épuration ne sont pas encore connectées avec le système d’eaux usées », déplore Cyril Bagues. Pour partager son savoir-faire dans la protection de la biodiversité et progresser sur d’autres thématiques, « le Costa Rica a signé un accord historique avec la région Provence-Alpes-Côte d’Azur qui s’appelle Duodiversité, pour échanger et apprendre mutuellement l'un de l'autre, dans la gestion des parcs ou de l’eau par exemple », indique Alexis Del Sale.

Des programmes d’échange pour progresser sur la durabilité

Ce type de coopération est attendue aussi bien dans le durable que dans d’autres secteurs. Toujours dans le cadre de ce programme Duodiversité, Alexis Del Sale souhaite prendre part avec son entreprise à un échange de savoir-faire sur le nautisme.  « On est en train d'établir une coopération entre l’Université du Costa Rica, l’Institut National d’Apprentissage costaricien et des écoles en France, toujours en étroite collaboration avec la région Provence-Alpes-Côte d’Azur. L'idée serait que les premiers élèves costariciens puissent se former en France pour ensuite revenir au Costa Rica et devenir à leur tour formateur. On créerait aujourd’hui un cycle d’apprentissage pour les travailleurs de demain ». Cette démarche a commencé à germer lorsque l’entreprise qu’il dirige, Arkane Groupe, s’est retrouvé confrontée au manque de main d’œuvre qualifiée dans le domaine nautique. « On s'est rendu compte qu'il fallait peut-être faire quelques pas en arrière, se présenter comme un acteur et non pas comme l'unique porteur de projets, collaborer avec les différents ministères concernés et apporter notre expertise en tant qu'acteur nautique depuis plus de 20 ans », se souvient Alexis Del Sale. 

Selon lui, la patience fait partie des facteurs gagnants pour son entreprise au Costa Rica. « Il ne faut pas aller trop vite en besogne. N’importe quelle entreprise qui arrive avec prudence et patience peut s’y développer, mais on ne fait rien vite ici », avise-t-il. Pour l’entrepreneur, son secteur a lui aussi besoin de s’améliorer en termes de développement durable. Il souhaite profiter de la lumière de l’événement sportif qu’il organise, Costa Rica Raid, pour mettre ce défi sous la lumière des projecteurs. « Si on lance l’événement et que le nautique se rend compte qu'il a des progrès à faire, cela permettra peut-être de devenir plus efficient, collaborer davantage et trouver davantage d’investissements pour devenir plus vert », espère-t-il. En attendant d’y parvenir, dans le cadre de sa course Costa Rica Raid, son entreprise coopère avec des associations locales comme Planta Mi Árbol pour favoriser la reforestation ou Mareblu qui œuvre à débarrasser les rivières, les océans et les côtes du plastique.

« Le cadre légal du Costa Rica s’inspire du Code Napoléon »

Pour pouvoir attirer le regard des investissements étrangers, le Costa Rica peut miser sur plusieurs avantages, à commencer géographique. « Stratégiquement, ici, il y a tout pour accéder aux Etats-Unis, l’Amérique Centrale et même l’Amérique latine. Certes le Costa Rica est un marché de cinq millions d’habitants, mais si on prend celui d’Amérique centrale, c’est cinquante millions ; celui d’Amérique latine, plus de cinq cent millions d’habitants », énumère Cyril Bagues. Le Costa Rica devient ainsi un hub sur le reste de l’Amérique centrale pour certains grands groupes français comme Schneider Electrics, qui y a ouvert une branche. Le pays, aussi appelé la Suisse d’Amérique centrale pour sa stabilité, offre également certains avantages fiscaux avec des zones franches et un système arrangeant pour les entreprises qui souhaitent s’installer, et ainsi faciliter les investissements étrangers. « On est aussi surpris par la similitude avec la France en termes légaux par exemple. La constitution vient du système français, le cadre légal s’inspire du code Napoléon. Cela fait partie des points positifs pour une entreprise française qui souhaite s'installer », souligne le directeur général d’Arkane Groupe. 

« Les entreprises françaises ont la chance d’être tout de suite prises au sérieux, avec une image d’excellence, de savoir-faire, de culture, et ça dans tous les secteurs confondus », ajoute Cyril Bagues. Pour l’un comme pour l’autre, l’un des critères de réussite est de s’entourer et de « se tropicaliser » : « Rapidement, en s'entourant d'un bon avocat, d'un bon comptable, en posant des questions aux Costariciens, on s’y retrouve », affirme Alexis Del Sale. A l’avenir, lui aussi compte s’appuyer sur sa branche au Costa Rica pour se développer sur le reste de l’Amérique latine et les Caraïbes : « On suit attentivement les pays environnants pour voir où peut être le prochain Costa Rica. Dans notre secteur, je vois un potentiel en Colombie, en Argentine, ou même au Brésil », prédit-il. 

Sources : 
Costa Rica : Contexte et situation économique et financière, Direction générale du Trésor (3 janvier 2023)
About Costa Rica : Costa Rica at a glance, Embajada de Costa Rica en Washington DC
Costa Rica: the ‘living Eden’ designing a template for a cleaner, carbon-free world, UN environment program (20 septembre 2019)
Parcs nationaux, Essential Costa Rica
Retour sur la mission Costa Rica : Le Projet Duodiversité, Agence régionale biodiversité et environnement

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