Revaloriser les mégots de cigarette, la solution écologique et innovante de TchaoMégot

Animé par l'envie d'entreprendre, Julien Paque n'attend pas d'être diplômé de son école d'ingénieur pour créer sa start-up. Le jeune homme fonde ainsi TchaoMégot en 2020. C'est le premier à proposer la dépollution sans eau ni traitement chimique des mégots avant leur recyclage. 

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Equipe TchaoMégot

« On jette près de 25 000 tonnes de mégots de cigarette chaque année en France ; ça représente quasiment trois fois le poids de la Tour Eiffel », affirme Julien Paque, le créateur de TchaoMégot. Un constat alarmant qui le pousse à s'attaquer à cette pollution généralisée, avant même la fin de ses études en conception mécanique au sein de l'École des hautes études d'ingénieur (HEI) de Lille. « J'ai réalisé mon stage de fin d'étude dans ma propre entreprise. L'école m'a dit qu'il fallait que j'aie une structure juridique qui porte mon stage, donc je suis devenu mon propre tuteur en créant ma société ». 

Après quatre mois de pure recherche et développement (R&D), le jeune homme met en place un processus capable de séparer du reste les substances toxiques présentes dans un mégot de cigarette, sans utiliser d'eau ni de solvant toxique. « On arrive à récupérer 99,7 % de la fibre propre dans la cuve et les 0,3 % des substances toxiques de l'autre côté », détaille l'ingénieur. Une étape clé du business plan de TchaoMégot, qui ne le limite toutefois pas à la dépollution du filtre usagé des cigarettes. « On a plusieurs activités aujourd'hui ; la sensibilisation auprès des fumeurs, la collecte et le recyclage de mégots, et enfin leur revalorisation en matériaux isolants pour le bâtiment ou le rembourrage textile », explique Julien Paque. Un système encore complexe, mais qui tend à se fluidifier pour être facilement réplicable. 

 

« Le plus dur n'était pas de trouver le modèle économique, mais de convaincre que celui que j'avais trouvé allait fonctionner » 

Diplômé est 2019, le jeune homme effectue un an d’incubation afin d’y développer son projet entrepreneurial et construire un business model durable. En 2020, il lance officiellement la SAS TchaoMégot. « Le plus dur n'était pas de trouver le modèle économique, mais de convaincre que celui que j'avais mis en place allait fonctionner. Quand j'ai trouvé cette idée, je me suis dit que ça alliait à la fois entrepreneuriat, écologie et potentiellement économie, car c'est un vrai défi de trouver un modèle économique viable, se rappelle le jeune homme. Ça a donné un sens à tout ce que je faisais, je n'avais jamais connu ça auparavant », s’enthousiasme Julien Paque. 

La start-up, qui compte aujourd’hui 20 personnes dans ses effectifs et réalise 1,6 millions d’euros de chiffre d’affaires, se doit d’être efficace sur chacune des étapes de la chaîne de revalorisation des mégots. Elle soigne tout particulièrement ses actions de communication auprès de sa cible : les entreprises et les collectivités. « En fait le fumeur, il est partout. Néanmoins on se voit mal lui demander de payer pour valoriser ses déchets. En revanche, une entreprise ou une collectivité peut contribuer financièrement, notamment parce qu'elle est soumise à des réglementations de développement durable ». C'est pourquoi l'entreprise conçoit des solutions clé-en-main à destination de ses clients : cendriers dont le design interpelle sur le recyclage pour mieux collecter les mégots, affiches de sensibilisation, etc. Des contrats qui assurent la récupération suffisante de matériaux à valoriser, tout en permettant une rentrée d’argent en continue. 

 

Accélérer le développement à grande échelle 

« Aujourd'hui, le coût de dépollution est plus onéreux que le matériau que l'on va revendre en sortie », confie Julien Paque. D'où la nécessité de travailler avec des volumes de plus en plus importants, de sorte à inverser la tendance. Avec un site industriel dans le Nord de la France, TchaoMégot ambitionne de "copier/coller" son modèle dans chaque région, puis, à terme, partout en Europe. « Cela représente plus de 40 millions d'euros d'investissement de bouleverser complètement le modèle économique. C'est pour ça qu'on a besoin aujourd’hui de développer des solutions de collecte : pour générer à la fois le flux de mégots et le flux d'argent et ce avec l’objectif de supporter la dépollution et après revendre la fibre en sortie », commente le jeune homme, qui a déjà signé avec plusieurs grands groupes pour de la collecte et de la sensibilisation. 

L'entrepreneur veut faire de sa solution de dépollution écologique la norme aux quatre coins du monde. Pour cela, il voit les choses en grand : « J'ai financé 50 000 € de brevet au niveau international. L'idée avec cette propriété intellectuelle, est de rendre notre innovation disponible à grande échelle en concédant la licence à nos futurs partenaires, aussi engagés que nous sur des sujets écologiques ». La start-up est par ailleurs déjà labellisée GreenTech Innovation. Si d'autres entreprises se sont spécialisées dans la dépollution de mégots et la réutilisation de cette fibre, « aucune n'est toutefois capable d'ôter la toxicité de ces déchets sans chimie ou incinération », conclut Julien Paque. 

elc
Emma-Louise Chaudron Rédactrice Web