Comment Pemlab s’est emparée d’un sujet de santé publique pour créer un lieu dédié aux femmes

Pemlab, la toute première boutique française dédiée au bien-être intime et menstruel, a ouvert ses portes dans le 2e arrondissement de Paris au printemps dernier. Entre magasin, ateliers, conférences et consultations, Big média a rencontré Léa Déturche, la co-fondatrice d’un lieu qui change les règles.

Pemlab, la toute première boutique française dédiée au bien-être intime et menstruel, a ouvert ses portes dans le 2e arrondissement de Paris
Léa Déturche et Julia Veneri, les fondatrices de Pemlab

Fringales, sautes d’humeur, anxiété et fatigue. Voici les symptômes exprimés par la plupart des femmes victimes de troubles prémenstruels, d’après une étude publiée en août 2022 dans Women’s Mental Health. Si deux milliards de femmes dans le monde sont touchées chaque mois, les initiatives, du moins au niveau français, restent peu nombreuses pour les accompagner au mieux. Lieu de vie et d’échanges en plein cœur de Paris, Pemlab a souhaité inverser la tendance en brisant notamment le tabou autour des règles douloureuses. Un concept que sa co-fondatrice a pris soin de nous expliquer dans le détail.
 

Pemlab, tiers-lieu conçu pour accompagner les femmes

Contraction de « personne menstruée » et de « laboratoire », Pemlab a été fondée en 2022 par Léa Déturche, 27 ans et Julia Veneri, 29 ans. « Ce projet a vu le jour lors de ma première année de Master Innover et Entreprendre à l’ESCP », confie Léa Déturche, également diplômée d’un Master de droit. « À la base j’avais pour ambition de lancer une marque de culottes menstruelles confectionnées à base de chanvre, plus écologique que le coton bio. C’est en réalisant une étude de marché que je me suis rendu compte de l’existence d’un large choix dans ce domaine. » Cette constatation, couplée à son tempérament altruiste pousse finalement la native de Sceaux à ouvrir un lieu dédié au bien-être intime et menstruel des femmes.
 
Rapidement rejointe par Julia Veneri, les jeunes entrepreneures imaginent un endroit dans lequel les femmes de tout âge peuvent, en plus d’acheter de la lingerie menstruelle ou des produits spécifiques pour la maternité, la ménopause ou la sexualité, demander conseil, consulter un spécialiste ou participer à des événements autour de la santé menstruelle. Si internet regorge de produits pour le bien être intime des femmes « le lien humain est fondamental dans toutes les questions qu’elles peuvent être amenées à se poser », explique Léa Déturche. « Finalement, l’utilité sociale à laquelle je me prédestinais lorsque j’étais engagée dans mon cursus en droit, je la retrouve complètement aujourd’hui au sein de ma boutique », assure-t-elle.
 

La santé publique comme moteur

Pemlab permet aussi à des spécialistes telles que des ostéopathes formées en gynécologie, des hypnothérapeutes, des naturopathes, des réflexologues, des psychologues ou encore des plaisirologues, d’exercer leur profession dans un endroit propice à la libération de la parole. Et de proposer des produits de médecine douce en phase avec les besoins et attentes de leurs clientes.
 
En 2023, le Spasfon fait toujours figure de médicament miracle censé atténuer les règles douloureuses. Il montre une efficacité dans la disparition des douleurs pelviennes après trois jours de traitement, peut-on lire dans un rapport rendu par la Haute Autorité de Santé en 2008. C’est ce que la majorité des pharmaciens ou des médecins généralistes prescrivent à leurs patientes, faute d’alternatives, avec des résultats pas très convaincants aux dires des principales intéressées. Véritable sujet de santé publique, les règles douloureuses ne sont pas reconnues, dans les faits, comme un handicap dans notre pays. Contrairement à l’Espagne par exemple qui est devenu le premier pays européen à adopter une loi en faveur du congé menstruel.
 
C’est pourquoi, à l’image de Pemlab, les initiatives privées (Glower, Jolly Mama, Sova…) pullulent pour tenter de soulager les différents troubles hormonaux touchant les femmes. « Une cliente sur deux franchissant le seuil de notre porte a un dérèglement hormonal ou une maladie gynécologique, type endométriose, syndrome des ovaires polykystiques (SOPK) ou ménopause compliquée », précise Léa Déturche. « Aujourd’hui, on ne soigne pas l’endométriose par exemple. Notre rôle est de trouver des solutions pour soulager les douleurs, qu’elles soient physiques mais également parfois psychiques. » Si certaines clientes savent exactement ce qu’elles recherchent en entrant chez Pemlab, « dans 80 % des cas, elles restent entre vingt minutes et une heure et demie et nous posent des tas de questions », confie la co-fondatrice de la FemTech, prouvant la nécessité de ce type de tiers-lieu.
 

Informer les femmes sur tous les sujets de bien-être intime

Si les deux jeunes entrepreneures ont souhaité créer un temple dans lequel les femmes se sentent écoutées et accompagnées, elles se sont également données pour mission de les informer sur tous les sujets du bien-être intime. « La pilule contraceptive, par exemple, représente une charge mentale importante pour certaines de nos clientes. À nous de comprendre au mieux leurs problématiques et de leur exposer des alternatives adaptées de contraception naturelle », note Léa Déturche. Pemlab prépare d’ailleurs une série d’événements autour de la symptothermie d’ici la fin de l’année, une méthode naturelle d'observation du cycle menstruel, en compagnie d’Alix Reigner, fondatrice de Magic Ovaries.
 
Engagée en faveur de l’environnement, la startup parisienne l’est également dans la lutte contre la précarité menstruelle. « Concrètement, nous collectons des protections périodiques que l’on redistribue à Règles Élémentaires. Je trouve dommage que les protections des grandes marques, bien souvent bourrées de pesticides, ne soient remboursées qu’en pharmacie, et pas dans une boutique comme la nôtre, associée avec des marques respectueuses des corps et de l’environnement », déplore la jeune entrepreneure. Un combat de plus à mener pour un concept que Léa Déturche espère démocratiser en ouvrant d’autres boutiques un peu partout en France. « Se soucier de son intimité doit devenir tout aussi naturel que de prendre soin de sa peau ou de ses cheveux », conclut-elle.

Simon NAPIERALA
Simon Napierala Redacteur web