TRIBUNE : « Structurer une entreprise est un puzzle intellectuel extrêmement complexe », la vision de Frédéric Mazzella, fondateur de BlaBlaCar

À l’occasion des 10 ans de Bpifrance, Big média donne la parole à des entrepreneurs de renom, qui  ont eu l’occasion de voir le paysage de l’entrepreneuriat évoluer. Ce mois-ci, nous laissons Frédéric Mazzella, fondateur et dirigeant de BlaBlaCar et de Captain Cause nous parler de sa vision. 

  • Temps de lecture: 2-3 min
TRIBUNE : « Structurer une entreprise est un puzzle intellectuel des plus complexes », la vision de Frédéric Mazzella, fondateur de BlaBlaCar

« "BlaBla quoi ? Mais c’est quoi ton vrai boulot ?" Si le métier d’entrepreneur pouvait surprendre il y a 10 ans, il est devenu aujourd’hui non seulement mieux compris, mais même convoité : plus de la moitié des 18-24 ans a envie de créer son entreprise. Notre pays compte plus de 20 000 startups, 400 structures d’investissement et même plus de 400 incubateurs. C’est un grand revirement. Lorsque j’ai lancé BlaBlaCar, j’ai lu plus d’une fois la compassion dans les yeux de mes interlocuteurs, que je peinais à convaincre du glorieux futur de mon projet : « partager l’usage des voitures en covoiturage, à l’échelle mondiale ». Et une fois le concept exposé, il fallait en prime expliquer le métier : mais que peut bien faire quelqu’un qui « travaille » pour quelque chose qui n’existe pas encore vraiment ? Eh bien il entreprend, il structure dans le monde réel tout ce qui n’existe à ce stade quasiment que dans son esprit. Et ce n’est pas le far west ! On s’imagine parfois que dans une startup il est possible de faire tout et n’importe quoi sans guide, process ou contrainte, mais l’entrepreneur découvre très vite que structurer une entreprise est un puzzle intellectuel extrêmement complexe : puisque justement rien n’existe encore, il faut, tel un architecte, concevoir un assemblage de produits, de méthodes, de messages, de financements, de personnalités et d’interconnexions qui va permettre de faire émerger une structure, portée par des personnes qui elles, auront un métier aux contours clairs. Le tout formera alors une organisation à même d’accueillir un usage nouveau que l’on espère massif : l’entreprise. Concevoir et structurer tout cela, eh bien c’est un vrai boulot !

« Le concept d’entrepreneuriat devient évident, et c’est salvateur »

Avec 100 millions de membres dans la communauté BlaBlaCar présente aujourd’hui dans plus de 20 pays sur trois continents, on constate que le concept de covoiturage est passé du bizarre… à l’évident. Au passage, on évite plus d’1,5 million de tonnes d’émission de CO2, par le simple fait d’optimiser le taux de remplissage des voitures. Il en va de même pour le concept d’entrepreneuriat, il devient évident, et c’est salvateur. Car  comment, si ce n’est en innovant, pourrait-on imaginer affronter les défis qui se dessinent devant nous ? Face au changement climatique, aux questionnements éthiques, au défi du maintien des démocraties, aux crises énergétiques anticipées ou non, et à bien d’autres défis  dont la liste est malheureusement longue, le statu quo, l’inertie et la perpétuation des habitudes et méthodes connues n’amèneront, pour sûr, pas la solution. Il va donc absolument falloir « faire autrement », c'est-à-dire, entreprendre.

Mais entreprendre comment ? Et pourquoi ? La direction se dessine, heureusement avec du sens : l’association France Digitale a recensé plus de 1 000 startups « à impact » en France, répondant aux 17 ODD (Objectifs de Développement Durable) de l’ONU. Quand on voit émerger aux côtés de BlaBlaCar et Doctolib des leaders mondiaux comme Back Market, TooGoodToGo, Ynsect, Verkor ou Yuka, on se dit que la France, comme toute l’Europe d’ailleurs, semble bel et bien en train de vouloir construire une « Tech for Impact »,  quand d’autres géographies rêvent plutôt de « Tech for Money », quand ce n’est pas de « Tech for Control ». 

La nouvelle génération d’entrepreneurs est donc « à impact ».

Sur ce, je retourne travailler sur ma nouvelle entreprise à mission, « impact by design » et « pending B-corp » : Captain Cause.

Captain quoi ? Mais c’est quoi ton vrai boulot ? »

Fréderic Mazzella, fondateur et dirigeant de BlaBlaCar et de Captain Cause.