L’IA au service des entreprises du tourisme

L’IA est partout, elle touche tous les secteurs et celui du tourisme ne fait pas exception. Les points forts de cette technologie ? Elle permet aux professionnels d’en finir avec les tâches besogneuses et les aide à mieux anticiper les demandes de leurs clients. Quant à ces derniers, leur processus de réservation s’en trouve simplifié. Ils peuvent même accéder à des voyages sur-mesure qui correspondent parfaitement à leurs besoins !

  • Temps de lecture: 4 - 5 min
IA et tourisme

Cliquer pour voyager, c'est désormais la norme. Même si beaucoup résistent à l'œuvre du temps, les traditionnelles agences de voyage ont dû se faire à la digitalisation. Aujourd'hui, sites de vente de billets d'avions ou de trains en ligne et réservation d'hébergement pullulent le net. Avec l’avènement de l’intelligence artificielle, c’est encore une nouvelle étape à franchir pour les professionnels du tourisme. Tous sont concernés, pas uniquement les grands noms du secteur. Pourquoi ? Car l’IA fait déjà partie des usages des Français pour réserver leur prochain séjour. En effet, d’après une étude eDreams Odigeo X OnePoll d’avril 2024, sur 1 000 consommateurs interrogés en France, 73 % déclarent utiliser des outils de l’IA pour des tâches liées aux voyages. Cette proportion augmente à 87 % du côté des 18-24 ans ! Véritable atout tant au côté des professionnels du secteur que des clients, l’intelligence artificielle donne des ailes. En premier lieu, elle permet de fluidifier les processus d’achat et de réservation. 

L’intelligence artificielle révolutionne l’industrie du tourisme 

En 2024, le monde a les yeux braqués sur la France avec l’organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024. Les demandes de voyage affluent en masse, confirmant ainsi la position de l’Hexagone comme première destination touristique. En 2023 encore, le pays a accueilli plus de 98 millions de visiteurs selon les chiffres d’Atout France. Et plus de 16, 1 millions de venues sont envisagées rien que sur la période des JO. L’expérience client se doit alors d’être irréprochable. Pour cela, l’innovation dans les processus de réservation, grâce à l’apport de l’intelligence artificielle, répond à un besoin grandissant de disponibilité : les clients veulent pouvoir réserver à toute heure, depuis n’importe quel support. Et c’est ce que vont permettre les chatbots et autres assistants virtuels. « Ce sont en quelque sorte des concierges d’hôtels augmentés, disponibles H24 », confirme Maalik Arban lors du webinaire IA et Tourisme, organisé par Bpifrance Université. Il est le directeur général adjoint de l’éditeur de logiciel E-Axess, spécialisé notamment dans le secteur touristique. « 60 % des réservations d’un établissement hôtelier sont réalisées entre 18 heures et 7 heures et les week-ends : soit des périodes durant lesquelles les personnes décisionnaires du revenue management ne sont pas là. Cela signifie que 60 % du chiffre d’affaires sont enregistrés quand on est absent ! Il faut donc une prolongation, une sorte de moi virtuel, qui pourra exécuter les réservations », poursuit-il.  

Optimiser la gestion des flux 

Optimisation des opérations, prévision de la demande, gestion des agendas : l’IA accompagne les entreprises sur tous les fronts. Elle peut même les aider dans l’analyse prédictive, anticipant à la fois le risque d’annulation et les tendances du marché pour ajuster les offres en fonction, un hôtelier ayant toujours besoin de savoir à quel prix il doit vendre. Si l’IA ne va pas générer la demande, elle est toutefois nécessaire pour la capter quand elle se présente. En somme, pour Maalik Arban, l’apport de l’IA est devenu nécessaire pour correspondre aux nouvelles attentes des consommateurs : « Le covid a bousculé les habitudes. Avant la pandémie, les Français pensaient à leur voyage plusieurs mois à l’avance. Après le Covid, les hôtels peuvent voir leur taux d’occupation passer de 0 à 100 % sur une même journée, avec une accélération de la prise de réservation : il faut donc des outils qui permettent de gagner en réactivité. »  

Encourager un tourisme plus durable et responsable 

 

L’un des plus grands avantages de l’IA est donc d’assurer (ou presque) un carnet de réservation plein. Mais elle permet aussi une meilleure personnalisation de l’expérience client. Ce dernier peut ainsi faire aboutir sa demande à toute heure, comme il peut sélectionner parmi les offres les plus pertinentes, qui correspondent à ses besoins et/ou envies. Les systèmes d’IA analysent en effet données et historiques d’achats pour recommander les offres les plus adaptées. L’une des illustrations les plus probantes est la possibilité de composer sur-mesure un voyage plus durable. Et pour cela, les internautes sont parfois perdus : où loger ? Quelles activités faire sur place ? Quel transport choisir ? Le contenu est souvent éclaté entre différents sites internet, entre ceux spécialisés dans l’hébergement, ceux orientés « inspiration » ou ceux dédiés au trajet. Rechercher un impact environnemental moindre quand on voyage devient mission impossible.  

L’IA aidera donc les internautes les plus soucieux de leur empreinte carbone à agréger cet ensemble d’informations. Sur le site GreenGo, cela se matérialise même sous la forme d’un éco-score qui atteste du degré vertueux des acteurs du tourisme. Ces derniers sont évalués d’après une liste de plus de 100 critères. Par exemple, le petit-déjeuner proposé dans tel hôtel est-il fait à partir de produits locaux ? De saison ? Avec un minimum d’emballages jetables ? « L’éco-score calculé par notre plateforme repose sur le travail conjoint entre un humain (qui va remplir le questionnaire) et la data (qui découle des réponses apportées). L’IA aide à la synthétisation de toute cette data et contribue à l’efficacité de l’algorithme », résume Guillaume Jouffre, le P-DG et cofondateur de GreenGo.   

L’humain garde la main 

Toutefois, quelques mises en garde doivent être formulées. La première ? L’accessibilité ! Autrement dit, quelle interface utilisateur sera déployée ?  « C’est elle qui fera que les futurs voyageurs utiliseront l’outil et que nous, nous récolterons de la donnée de qualité. Il est toujours possible de réaliser des choses très complexes avec l’IA, mais si personne ne comprend rien à l’interface, il ne se passera rien », alerte Guillaume Jouffre (GreenGo). D’où la nécessité de faciliter au maximum la compréhension de l’information et de fournir des solutions intuitives : si l’interface rebute les clients et professionnels, peu de chance qu’elle soit adoptée à grande échelle. C’est ce que soutient d’ailleurs Rémi Boisson, cofondateur de l’application Extracadabra qui fait matcher établissements de la restauration et candidats en quête d’un poste en extra ou plus pérenne. « Pour séduire les recrues dans ce secteur qui connait d’importantes difficultés de personnel, il faut travailler sa marque employeur. Cela signifie, pour chaque établissement inscrit, de réunir un maximum d’informations qui feront la différence (genre de restauration, modalités de pause, organisation générale, logiciels utilisés, etc.). Du côté du candidat, il suffit de remplir un questionnaire à partir de ses hard et soft skills pour établir le meilleur profil possible. Plus on réunira de données, plus on pourra relayer la bonne association établissement/candidat », développe-t-il. L’IA, sur la base d’une data fournie et vérifiée, limite ainsi le risque de se tromper. Cependant, cela ne signifie pas pour autant qu’elle prendra le lead de manière indépendante sur le business. L’humain conserve la main sur la stratégie que souhaite déployer chaque établissement. L’IA repose sur des statistiques, des probabilités : l’intervention humaine peut affiner les résultats ou les challenger, faisant intervenir sa connaissance de l’environnement de travail et des besoins réels. « L’humain ne doit pas s’effacer derrière la technologie : il faut pouvoir créer une combinaison entre l’objectivité de la machine et la subjectivité de l’humain (sa connaissance de l’environnement) », insiste Maalik Arban (E-Axess).  

IA : une contribution à hauteur de 15 700 milliards de dollars en 2030 

Alors les entrepreneurs du tourisme doivent-ils s’emparer de l’IA ? D’avis d’experts, la réponse est oui. « Le premier pas, c’est de s’interroger : quel est le temps que peut me faire gagner l’IA ? Avec cette technologie, qu’est-ce que je peux apporter à la fois à mes clients et à mes collaborateurs ? », soulève Rémi Boisson (Extracadabra). Là aussi, la compréhension est clé : il faut commencer sur ce qui semble à portée de l’entreprise et implanter les solutions au fur et à mesure. En ça, la formation sera essentielle, valorisant à nouveau ce nécessaire travail entre technologie et humain. D’autant plus que l’attente de personnalisation sera probablement grandissante du côté des consommateurs, de nouvelles solutions étant à prévoir dans les mois et années à venir. Le marché de l’IA ne fait que commencer car elle pourrait contribuer à plus de 15 700 milliards de dollars à l’économie mondiale, à horizon 2030 ! Pour les professionnels, c’est à nouveau la promesse de tâches besogneuses délaissées au profit du temps passé auprès du client. C’est aussi le gage de rester compétitifs grâce à de meilleures efficacité et compréhension du marché. L’IA continuera donc de bouleverser le secteur, ouvrant sans cesse de nouveaux cas d’usage. Elle contribuera aussi probablement à l’accélération de la transition écologique du tourisme, les acteurs de ce secteur étant stimulés pour rendre leurs offres et services encore plus responsables.  

Céline Tridon

Céline Tridon

Rédactrice en Chef