SideROS, la deeptech qui offre une alternative à la chimiothérapie

Depuis 2019, la deeptech SideROS développe, à partir d’une molécule de synthèse un nouveau traitement contre les récidives de cancers, ciblant les cellules résistantes aux traitements conventionnels. Dans ce nouvel épisode du podcast « Ca c’est deep », Lucie Mondoulet, présidente de l’entreprise, revient sur le développement scientifique et entrepreneurial de cette découverte majeure.  
 

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Le fer pour combattre le cancer. Lorsque Lucie Mondoulet, ingénieure et docteure en biochimie, croise la route de Raphaël Rodriguez, directeur de recherche au CNRS, le jeune chercheur travaille activement à l’analyse du fonctionnement des cellules souches cancéreuses responsables du développement de tumeurs et de récidives chez les patients. « Raphael a observé que, même si elles étaient bombardées de traitements, ces cellules arrivaient encore et toujours à s’adapter en se métamorphosant, esquivant ainsi toutes les armes thérapeutiques existantes », explique Lucie Mondoulet, présidente de SideROS.   
 
Pourtant, le directeur de recherche au CNRS identifie une faille. En étudiant la composition de ces cellules, il remarque qu'elles contiennent beaucoup plus de fer que les autres. Et c’est justement ce nutriment qui leur permet de se multiplier à vitesse grand V, entretenant ainsi les tumeurs. Il se lance alors dans le développement d’une molécule capable de capturer le fer présent dans les cellules cancéreuses et ainsi les priver de leur source d’énergie. 

"La chimiothérapie est jugée largement insatisfaisante par la communauté médicale"

Avec près de 400 000 nouveaux cas et 150 000 décès par an, les cancers représentent à eux seuls la première cause de mortalité en France devant les maladies cardio-vasculaires. En 2018, on estimait à 3,8 millions le nombre de Français de 15 ans et plus ayant eu un cancer au cours de leur vie*. Des patients chez qui le risque de récidive augmente en moyenne de 36 % par rapport à la population générale, ce qui implique, dans la majorité des cas, un recourt à la chimiothérapie. « La chimiothérapie est jugée largement insatisfaisante par la communauté médicale car elle n'est pas adaptable à chaque malade, ce qui en fait un traitement qui soigne autant qu’il provoque, en parallèle, de nombreux effets indésirables chez les patients », note la présidente de SideROS.  

Pour éradiquer les cellules persistantes et éviter ainsi des traitements supplémentaires, Raphael Rodriguez a mis au point une molécule de synthèse capable de combattre les cellules souches cancéreuses résistantes. Dérivée de la salinomycine - un médicament thérapeutique antibactérien qui s’attaque aux cellules souches cancéreuses - cette molécule est brevetée sous le nom d’ironomycine. Son action consiste à piéger le fer nécessaire au bon fonctionnement de ces cellules, ce qui entraine à terme leur destruction. Une innovation majeure qui a rapidement fait ses preuves lors de tests in vitro qui ont confirmé son efficacité sur des cancers résistants et métastasiques comme le cancer du côlon, du sein, les lymphomes ou les leucémies. « Quand j’ai rencontré Raphael, cela faisait déjà quelques années qu’il voulait rendre son innovation accessible aux patients », rappelle Lucie Mondoulet. « La société SideROS était créée, mais il s’est rapidement rendu compte que le seul métier de chercheur ne lui permettrait pas de rendre cette découverte accessible à tous. Ma mission a donc été de structurer le projet et l’amener chez les malades ».   

Une innovation adaptable à tout le secteur de l’oncologie 

Mais avant de pouvoir apporter cette solution au patient, SideROS va d’abord devoir réaliser des essais cliniques. Phase « pivot » du développement d’un médicament après les phases de recherche en laboratoire et sur les animaux, les essais cliniques permettent d’établir la preuve que le concept fonctionne chez les patients. La phase un de ces essais est réalisée chez l’être humain afin d’évaluer et préciser la sécurité d’emploi ainsi que le devenir du produit dans l’organisme. Les phases deux et trois permettent quant à elles de confirmer l'efficacité thérapeutique de la molécule sur une maladie donnée. Lors de la phase quatre, on pourra suivre le médicament dans la vraie vie. A partir de la création de la société, il faut deux à trois ans avant de pouvoir amener une solution en première évaluation chez le patient.  

« Aujourd’hui ce qu’il nous manque pour avancer encore plus vite, c’est un outil qui nous permettra de repérer ces cellules cancéreuses persistantes chez le patient, afin de ne proposer notre molécule qu’aux personnes qui les auront développées, et donc chez qui notre solution sera efficace. C’est un projet sur lequel nous avons déjà identifié le marqueur et qui va nécessiter beaucoup de ressources financières et humaines », note Lucie Mondoulet.  
S’il reste encore du chemin à parcourir pour que la solution de SideROS soit accessible à tous, l’entreprise ambitionne déjà d’élargir le potentiel de sa découverte à tout le secteur de l’oncologie.  « On sait que le fer est impliqué dans d’autres maladies, donc il ne fait aucun doute que dans un deuxième temps, on s’intéressera à des secteurs thérapeutiques plus variés, comme les maladies inflammatoires par exemple. Mais déjà, si on arrive dès le diagnostic à proposer une solution qui stabilise et qui empêche le cancer de progresser, je pense que ça sera un grand succès ! », conclut la présidente de SideROS.  

*Selon les données de la Fondation Arc pour la recherche sur le cancer 

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Mélanie Bruxer Rédactrice web