De rugbyman professionnel à fondateur d’un label écologique : les débuts d’entrepreneur de Julien Pierre

Ancien joueur de l’ASM Clermont Auvergne et de l’équipe de France de rugby, Julien Pierre a décidé de troquer sa carrière de sportif pour développer Fair Play For Planet, une entreprise qui accompagne les entités sportives dans l’amélioration de leur modèle économique en prenant soin de l’environnement et des personnes. Un grand écart sur lequel l’ex-joueur professionnel revient le temps d'une interview.

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Julien Pierre

« J’avais ce besoin de créer et aussi, inconsciemment, de me mettre en danger pour retrouver l’adrénaline du sport de haut niveau. »  C’est avec ces arguments que Julien Pierre, fondateur de Fair Play For Planet, justifie son entrée sur le terrain de l’entrepreneuriat en 2020. Pour autant, le sportif décide de ne pas totalement quitter son secteur de prédilection puisqu'il développe un label écologique conçu autour d’une approche globale de la lutte contre le dérèglement climatique à destination du monde du sport. 

Et si la création de ce label est récente, l’envie d’entreprendre, elle, semble sommeiller depuis longtemps chez Julien Pierre.  « Elle est née il y a dix ans avec la création de ma fondation Play For Nature. Ensuite, avec la fin de ma carrière et l’envie d’avancer et créer quelque chose, j’ai pu tout mettre en place. » Pour Big média, il revient sur ses débuts dans l’entrepreneuriat et les points communs entre cette expérience et celle de sportif professionnel.  

« Le sport reste un formidable levier pour mener des actions éco-responsables » 

Big média : Pourquoi avez-vous choisi d’entreprendre dans le sport et l’environnement ?  

Julien Pierre : Ces deux passions m'ont toujours animé et j’avais envie de créer quelque chose pour les lier. J'ai grandi dans une famille très engagée, ce qui m'a donné la chance d'en apprendre plus sur la préservation de l’environnement et des espèces menacées. A 16 ans j'ai dû commencer à me concentrer davantage sur ma carrière de sportif et mettre de côté cette passion. Pourtant, en 2009, après un voyage à Sumatra, en Indonésie, j'ai réalisé à quel point ces engagements étaient toujours profondément ancrés en moi et qu’il fallait à tout prix que j'en fasse quelque-chose. 

Quelques années plus tard je créé une première association, Play For Nature, un projet qui me guide, et sur lequel je vais continuer à m'investir. Et quand j'ai lancé Play For Planet, il me paraissait évident de m'orienter vers le secteur sportif, dont je connais plutôt bien les problématiques. 

BM : Selon vous, est-ce que le monde du sport délaisse trop l'environnement ? 

JP : C’est un sujet qui a été mis de côté comme dans beaucoup d’autres secteurs. Le sport a toujours été très axé sur les enjeux sociétaux. Les clubs sont des acteurs sociaux extraordinaires au sein des territoires qui réunissent petits et grands, des enfants aux parents sans oublier les bénévoles. 

Pour autant, Il est vrai que l'environnement était un sujet très peu abordé il y a cinq ans à peine. Malheureusement, des événements ont accéléré cette prise de conscience, et le sport reste un formidable levier pour mener des actions éco-responsables.  

« Je pense que le sportif a les qualités et capacités nécessaires pour se lancer dans l’entrepreneuriat » 

BM : Vous faites partie de la première vague de sportifs professionnels à se lancer dans l’entrepreneuriat, est-ce que c’est quelque chose que l’on doit transformer en habitude ?  

JP : C’est en fonction des ambitions et envies de chacun mais je pense que le sportif a les qualités et capacités nécessaires pour devenir entrepreneur. Pour autant, il ne faut pas oublier qu’il baigne dans un environnement spécial lors de sa carrière professionnelle et reste extrêmement assisté.  

Ça me rappelle une phrase de Thierry Dusautoir : « Je me suis retrouvé du jour au lendemain avec un planning qui était vide. » De 18 ans jusqu’à 35 ans on nous donne un emploi du temps complet : entrainement, déjeuner, match, vidéo. Et d’un seul coup on passe à l’entrepreneuriat où le planning est irrégulier, ça peut être déstabilisant.  

BM : Selon vous, quelles sont les qualités d'un sportif de haut niveau qu'on retrouve dans l'entrepreneuriat ? 

JP : J’ai eu la chance de faire une longue carrière et aussi d’avoir la patience de réussir. C’est ce qui est important dans l’entrepreneuriat je crois. Attention, être patient ne veut pas dire que je ne suis pas impatient, bien au contraire, mais pouvoir se projeter sur une longue durée sans chercher à se précipiter est important.  

De même avec l’adaptabilité et la remise en question que l’on retrouve dans le monde du sport professionnel quand on passe du championnat de France à la coupe d’Europe puis à l’Equipe de France. Ce sont des qualités indispensables, d’autant plus au lancement d’un projet, où il faut être lucide pour pouvoir changer de cap si besoin et ne pas craindre de se tromper ni de le dire.  

BM : Est-ce que les sportifs de haut niveau ont un avantage par rapport aux autres au moment d'entreprendre ?  

JP : Nous avons la chance d’apprendre sur nous tout au long de notre carrière et de finir par se connaître. C’est le plus important pour moi de situer ses points forts et ses limites. Nous sommes une petite équipe chez Fair Play For Planet, mais je ne crains pas de déléguer totalement une tâche à certains de mes collaborateurs. De la même façon que sur un terrain de rugby je n’étais pas capable d’aller marquer l’essai sur le bout de ligne. Chacun a son rôle, et même si ça n’empêche pas la surveillance, on se fait confiance et c’est indispensable dans l’entrepreneuriat ou le sport.  

Emmanuel Lanoe
Emmanuel Lanoe Rédacteur Web