CybelAngel, l’entreprise française qui conquiert le marché américain de la cybersécurité

Créé il y a à peine 7 ans, CybelAngel est aujourd’hui l’un des leaders du marché de la cybersécurité en matière de fuites de données sensibles. Grâce à une technologie unique, l'entreprise détecte les données critiques sur internet et les rend aux entreprises victimes.

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Erwan Keraudy

Alors que la plupart des entreprises de cybersécurité raisonnent en matière de protection du périmètre d’une société, CybelAngel propose de raisonner autrement : protéger en rendant les données au plus vite à leurs propriétaires. Cette nouvelle vision de la cybersécurité a valu à l’entreprise un développement rapide sur le marché international. Erwan Keraudy, cofondateur et CEO de l’entreprise nous livre ses meilleurs conseils pour s’intégrer au marché américain de la cybersécurité.

CybelAngel, n’emprunte pas le nom de Cybèle, gardienne du savoir dans la mythologie grecque, pour rien. Partout dans le monde, Erwan Keraudy, cofondateur de l’entreprise, et ses deux associés scannent des données sensibles de grands groupes extrêmement concernés par les enjeux sécuritaires. À la genèse de CybelAngel une découverte au hasard de données extrêmement sensibles concernant de grandes sociétés sur internet et un constat : entre de mauvaises mains, ces données peuvent nuire à l'image comme aux finances des entreprises. Il s’agit donc de prévenir des fuites de leurs données sur le web, avant que des hackers ne s’en emparent. L’entreprise développe son portefeuille dans différents domaines d’activités : dans le secteur pharmaceutique avec Sanofi, dans le secteur agroalimentaire avec Danone, dans le secteur pétrolier avec Total etc. Au-delà du CAC 40, l’entreprise est solidement établie sur le marché américain, un marché qu’elle a décidé de conquérir il y a 2 ans.

Bpifrance : En décembre 2018, vous avez décidé de conquérir le marché américain grâce à une levée de fonds de 12 millions de dollars, comment s’est passée cette intégration ?

Erwan Keraudy : Nous avons décidé de conquérir le marché américain de la cybersécurité car c’est le plus grand marché dans le secteur. C’est important de se lancer et de viser grand. Nous étions convaincus de présenter une proposition de valeur unique, nous proposons aux sociétés de lutter contre les fuites en scannant leurs données sensibles. Nos concurrents sur le marché de la cybersécurité agissent en essayant de prévenir les fuites sans se poser forcément la question de ce qu’on peut faire si le périmètre d’une société est attaqué et que la fuite a effectivement lieu. Nous sommes les seuls à se poser cette question et à proposer cette solution au-delà du périmètre de l’entreprise. 

B : Quelle carte avez-vous jouée pour vous positionner sur le marché américain au début de votre ouverture à l’international en tant qu’entrepreneur français ?

E. K. : C’est important de jouer la carte de l’originalité. Nous avons été assez à l’aise pour proposer quelque chose de nouveau et surtout, sans aucun complexe ! Aux Etats-Unis les entrepreneurs viennent de partout : d’Inde, de Chine, du Moyen-Orient etc.  Être français ou ne pas l’être n’a pas d'importance, apporter de la valeur c’est ce qui compte. Le marché américain est un monde transactionnel : à partir du moment où vous apportez de la valeur, vous vous placez sur le marché quelle que soit votre nationalité. Si je dois donner un conseil pour bien se positionner sur ce marché, je dirais "implantez votre société aux Etats-Unis”. Miser sur le côté français en abordant ce marché est une erreur à mon sens. La France n’a pas encore de notoriété établie en cybersécurité.

B : En quoi le marché américain diffère-t-il du marché français ? Avez-vous dû adapter votre technologie ou stratégie pour intégrer ce marché ?

E. K. : Nous n’avons rien adapté en termes de technologie. L’offre est la même pour tout le monde en Cybersécurité. En revanche, nous avons adapté notre message. Aux Etats-Unis, les besoins des sociétés américaines sont différents de celles françaises. Un exemple : on présente en France l’offre technologique en premier, ensuite l’offre de valeur, aux Etats-Unis il faut d’abord commencer par la valeur que l’offre apporte à la société avant de parler technologie.

B : Sur quelle technologie repose CybelAngel pour agir contre les fuites d’informations sensibles et les cyberattaques ? 

E. K. : Nous avons créé un scanner d’internet qui parcourt tout ce qui est connecté sur le web, une espèce de Google de tout ce qui est sur la planète digitale. Avec cette technologie unique on trouve un milliard de documents tous les jours que Google n’a jamais vus. Parmi ces trouvailles, des documents extrêmement confidentiels et critiques de grands groupes. Nos algorithmes d’intelligence artificielle sont capables de faire le tri dans les données disponibles sur le web pour identifier ce qui appartient à nos clients et ce qui ne leur appartient pas, ce qui est critique et ce qui ne l’est pas.

B : Quels sont vos objectifs pour l’horizon 2025 ?

E. K. : Devenir un acteur mondial, voire même l’acteur numéro 1 dans le domaine de la détection de fuites. Aujourd’hui notre stratégie consiste à mieux nous positionner aux Etats-Unis, d’attaquer ensuite d’autres marchés pour devenir le leader mondial en Asie, au Moyen-Orient et ailleurs. Nous avons déjà commencé le chemin ! Nous avons aujourd’hui des bureaux en France, en Angleterre, en Allemagne, à New York et à Boston. Nous avons aussi des clients partout dans le monde, en Scandinavie, au Japon, au Moyen-Orient, etc.

B : Vous venez de nous donner un précieux conseil pour se positionner avec succès sur le marché américain, avez-vous d’autres conseils pour une entreprise française en cybersécurité qui désire exporter son savoir-faire à l’international ?

E. K. : Il faut avoir un market fit et être sûr que son offre résout des problèmes en France et en Europe. Ensuite, dans un deuxième temps, ne pas hésiter à lever de l’argent pour aller aux Etats-Unis car c’est en effet un marché extrêmement cher. Un autre conseil pour gagner ses premiers clients : aborder les plus grands groupes en faisant ses ventes soi-même. Faire ses propres ventes permet d’apprendre comment présenter le message aux Américains. La façon de présenter le message doit être sensiblement différente entre l’Europe et les Etats-Unis et c’est aux fondateurs d’aller faire leurs ventes eux-mêmes pour s’en rendre compte. Pour conclure, il faut simplement oser, se déplacer et ouvrir ses bureaux dans les marchés prioritaires pour son activité.