Comprendre la révolution blockchain

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Une blockchain pour lutter contre le trafic de faux médicaments en Afrique subsaharienne

La blockchain, technologie de stockage et de transmission d’information, intéresse depuis plusieurs années tous les secteurs d’activité, et en particulier celui de la santé. Ces différentes applications permettraient des avancées considérables dans la protection des vies humaines. Explications.

Meditect Afrique meditect

Selon l’Organisation Mondiale de la Santé, 10 à 30 % des médicaments qui circulent dans les pays en développement sont des faux. La vie de millions de consommateurs pâtit de ce trafic de faux et à leur insu, les patients participent à alimenter le marché noir. D’autant plus que ce sont « les communautés les plus vulnérables [qui] sont les premières touchées par les médicaments de qualité inférieure ou falsifiés », déclare le Dr Tedros Adhanom Ghebreyesus, ancien directeur général de l’OMS sur le site. La majorité des signalements enregistrés par l’OMS pour trafic de faux médicaments concerne la zone d’Afrique subsaharienne.  

Un constat alarmant qui pousse depuis des années les acteurs du secteur de la santé à améliorer leur système de distribution. Hôpitaux, centres de recherche, compagnies d’assurance, laboratoires pharmaceutiques et patients auraient tout intérêt à profiter de la technologie des blockchains, puisque celles-ci permettraient une meilleure traçabilité des médicaments grâce à des systèmes de registre inaltérable. Une situation qu’ont clairement identifié les deux fondateurs de Meditect grâce à leur expérience passée sur le terrain.  

« 85 % des pharmacies de Côte d’Ivoire utilisent déjà notre technologie » 

« Grâce à la blockchain, registre inaltérable, nous sommes capables d’apporter un degré de sécurité inégalé et de protéger les patients », explique l’ancien médecin humanitaire, lancé avec Meditect dans l’entrepreneuriat depuis 2018. « La blockchain que nous avons développée indique aux pharmaciens si les médicaments qu’ils vendent sont fiables », poursuit-il. « Les laboratoires nous communiquent le numéro de série des médicaments, et nous produisons des hashs, fractions de ce numéro ». Lorsque les médecins, pharmaciens ou patients scannent le produit, ils inscrivent ainsi dans la blockchain des informations telles que la localisation, ou la date et l’heure, et permettent ainsi de réaliser une chaine de traçabilité fiable. Une innovation qui permet la régulation et l’optimisation de ce marché, en particulier dans les zones les plus défavorisées où les populations sont souvent en manque d’accès au soin et en peine d’infrastructures médicales.   

« 85 % des pharmacies de Côte d’Ivoire utilisent déjà notre technologie », affirme Arnaud Pourredon, co-fondateur de Meditect. Grâce à une blockchain mise au point par leur équipe, les patients peuvent identifier et retracer la provenance des médicaments qu’ils s’apprêtent à consommer. Cette avancée a notamment été rendue possible par la mise en place de directives européennes et internationales. En effet, les lois obligent depuis février 2019 les laboratoires pharmaceutiques, fabricants de médicament, à doter chaque boîte d’un numéro unique, un datamétrix. C’est ce code unique qu’il faut scanner pour savoir si le produit est contrefait ou authentique. 

D’autres applications majeures de la blockchain dans le secteur de la santé à l’étude 

Si la blockchain permet de lutter contre le trafic de faux médicaments, et pourrait potentiellement sauver 700 000 pertes humaines dans le monde liées à ce fléau selon une infographie réalisée par Maddyness et le LabSanté, cette innovation permettrait d’optimiser le secteur de la santé sous bien d’autres aspects. Et la protection des données des utilisateurs des systèmes de santé est cœur de ces enjeux de sécurité. Convoitées par les hackers, car elles se revendent en moyenne 20 fois plus chères que les données bancaires, les données des patients du monde entier pourraient être sécurisées grâce à la décentralisation et à l’inaltérabilité de la blockchain.

Les systèmes de blockchain pourraient également participer à la demande de transparence de la part des consommateurs, qui critiquent parfois les laboratoires pharmaceutiques et leur programme de développement de produits. Cette perte de confiance des consommateurs pourrait être palliée par la mise en place de blockchains dans le secteur de la recherche. Mehdi Benchoufi, médecin chercheur en santé publique à l’APHP (Assistance Publique - Hôpitaux de Paris) a par exemple présenté un projet de traçabilité des process et des données utilisées dans les essais cliniques des laboratoires pharmaceutiques. Une initiative remarquée par le monde de la recherche.