Pourquoi l’Allemagne attire de plus en plus de fintechs françaises ?

Au sortir de la crise sanitaire, les entreprises françaises de la tech semblent favoriser les relations avec les autres pays européens et en particulier l’Allemagne, qui fait aujourd’hui figure de premier partenaire commercial de la France. Une dynamique que nous explique Florent Buschiazzo, responsable pour la zone Europe chez Bpifrance, à Düsseldorf.

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33 % des fintechs françaises sont installées outre-Rhin. C’est le deuxième pays qui en compte le plus en Europe derrière l’Espagne (41 %), selon l’étude de France Fintech. D’un point de vue plus général, l'Allemagne était le premier partenaire commercial de la France en 2021, avec des exportations à hauteur de 68,4 milliards d’euros, d’après les chiffres de la Direction générale du Trésor. Une entente également visible dans le domaine de la fintech, comme nous l’explique Florent Buschiazzo.

Big média : Quels sont les intérêts pour les entreprises françaises de s’installer en Allemagne ? 

Florent Buschiazzo : L’Allemagne est la première puissance économique européenne, en plus d’être le pays le plus peuplé d’Europe et le premier marché à l’export de la France. Ces critères pèsent forcément dans la balance au moment de choisir un pays étranger dans lequel s’implanter. D’autant plus que l’Allemagne possède énormément d’opportunités et de marchés à prendre, qui sont extrêmement solvables. 

Pour ce qui est de la fintech, même si ce n'est pas un secteur leader dans le pays, il occupe malgré tout une place importante dans les trois grands pôles d'activités que sont Berlin, Munich et Dusseldorf. Dans la capitale, en particulier, qui représente la marque allemande et donne accès à un excellent écosystème internationalisé composé de grandes sociétés. 

BM : Est-ce que le marché allemand est une étape presque obligatoire pour les fintechs qui souhaitent s’imposer en Europe ?  

FB : Il ne constitue pas une étape obligatoire. Il existe d’autres places financières très importantes comme Londres en Europe ou Singapour en Asie, mais l’Allemagne reste un marché de premier plan. Une société avec des prétentions à l’international, et notamment sur le Vieux Continent, a plutôt intérêt à se diriger vers l’Allemagne. Le marché local de la fintech regorge d’opportunités pour les entreprises françaises, notamment grâce à leur avance dans le domaine du quantique ou leur capacité à répondre au besoin du plan de relance qui vise à digitaliser les banques et le secteur financier.   

D’après une étude réalisée par la banque nationale allemande, plus de la moitié des paiements du pays s’effectuent en liquide, il y a donc un pas de géant à faire pour démocratiser le paiement sans contact et un changement de mentalité à engager. Tout cela apparaît comme une vraie opportunité de croissance pour toutes les entreprises françaises du domaine de la fintech. 

BM : D’après-vous, cette étape peut servir de tremplin pour tenter de s’implanter par la suite en Europe de l’Est ?  

FB : Bien sûr, les entrepreneurs peuvent même viser plus loin que l’Europe de l’Est. Dernièrement nous avons accompagné, avec la participation de Bpifrance, l’entreprise Silvr, une plateforme de financement des entreprises du numérique ayant recourt au revenue based financing, avec le programme Impact Germany, opéré par notre partenaire BusinessFrance. Cette solution vise à rembourser les emprunts directement sur une proportion du chiffre d’affaires et de pouvoir irriguer financièrement toutes les marketplaces et toutes les sociétés qui vendent en ligne. Silvr a déjà de très belles perspectives en France et son implantation prochaine en Allemagne lui permettra de devenir un géant européen de la fintech.  

BM : Est-ce un marché ultra concurrentiel ?  

FB : Tous les marchés allemands sont concurrentiels du fait de l’attraction de nombreux capitaux étrangers. C’est un pays extrêmement cosmopolite où les ingénieurs et entrepreneurs viennent des quatre coins du globe. On y retrouve en particulier l'expertise tech des Hollandais qui possèdent de nombreuses startups. Si ce marché reste concurrentiel, avec un bon produit, le fonctionnement est tout de même pragmatique où il suffit d’une offre et d’une demande comme cela a été le cas pour Doctolib lors de la crise sanitaire. D’ailleurs, les entrepreneurs français gardent de l’avance dans le domaine de la finance grâce à une mentalité et une agilité qui leur permettent de se développer à l’international. 

BM : Quels sont les erreurs à ne pas commettre pour s’implanter outre-Rhin d’après vous ?  

FB : Il faut s’accoutumer à la culture locale. C’est une mentalité particulière et une langue qui l’est toute autant au sens propre comme au figuré. L’Allemagne a sa propre façon de gérer les affaires et il est conseillé de s’associer à des personnes qui connaissent le marché ainsi que son langage et les codes à respecter. Il est également très important d’avoir une filiale, une marque allemande, peu importe le secteur dans lequel vous voulez évoluer, afin d’être identifié d’un point de vu national. Dès que vous l’êtes, avec un ou deux clients de référence, c’est tout un marché qui s’offre à vous.  

Emmanuel Lanoe
Emmanuel Lanoe Rédacteur Web