New Space : « Notre objectif avec Prométhée est de démocratiser l’observation de la Terre »

Prométhée, opérateur New Space d’une constellation de nano satellites d’observation de la Terre, a récemment bouclé sa deuxième levée de fonds de 4,72 millions d'euros – une croissance à l’image du secteur, lui aussi en pleine expansion. Giao-Minh Nguyen, DG de la jeune pousse française, revient sur l’inspiration derrière Prométhée et nous partage sa vision de l'avenir de l'écosystème français.

  • 30 juin 2022
  • Temps de lecture: 5 min
New Space

Après un diplôme d’ingénieur en mécanique avec le CNAM, c’est d’abord dans l’aéronautique que Giao-Minh Nguyen débute sa carrière professionnelle avant de découvrir plus tard le secteur du spatial. Il passe sept ans dans le groupe SAFRAN avant de rejoindre Airbus pendant 10 ans au sein de la division spatiale Astrium – en tant que directeur des achats dans la branche satellite, puis en tant que directeur des programmes chez Ariane Group. Durant cette période, Giao-Minh Nguyen a également piloté des activités de surveillance de l’espace ainsi que le programme de micro-lanceur Q@TS (Quick Access To Space), dédié au lancement de CubSat, un format de nano-satellites. C’est à ce moment-là qu’il découvre le secteur du New Space avant d’intégrer Open Cosmos, une startup britannique de fabrication de CubSat, en tant que VP des opérations et des ventes institutionnelles, avant de fonder Prométhée deux ans plus tard. 

Big Média: Qu’est-ce qui vous a attiré dans le secteur du New Space ? 

Giao-Minh Nguyen: D'une part, ses challenges techniques et commerciaux, et d’autre part, toute la conduite du changement associée. Quand je suis arrivé dans ce secteur, le spatial était réservé à des enjeux stratégiques de défense ou scientifiques. Ce qui m’anime, à présent, c’est ce nouveau marché lié à la démocratisation du spatial avec cet enjeu commercial très appuyé que représente le New Space. Et grâce à des personnalités comme Thomas Pesquet, qui ne rêve pas de l’espace aujourd’hui ? 

D’ailleurs, les astronautes ayant observé la Terre depuis l’espace ont tous été touchés par sa beauté, sa fragilité, et une envie de la protéger. Ce phénomène s’appelle l’« Overview Effect », et c’est ce que fait Prométhée. C’est-à-dire protéger les hommes et la planète en utilisant les « outils » les plus innovants pour surveiller notre environnement en constante évolution, et ainsi permettre aux gouvernements, aux entreprises et aux citoyens de pouvoir prendre les meilleures décisions car voir c’est savoir et savoir c’est pouvoir agir. 

BM: Quel a été l’élément déclencheur qui vous a conduit à cofonder Prométhée ? 

G-M N: La rencontre avec Olivier Piepsz, à l’époque VP de la direction internationale de Safran, lorsque je pilotais le programme Q@TS chez Ariane Group. Nous nous sommes aperçus que les utilisateurs de données spatiales recueillies via l’observation de la Terre représentaient moins de 1% de la population mondiale. Or l’observation par satellite permet aux acteurs publics et privés et aux gouvernements d’avoir une compréhension globale des territoires et de planifier leurs actions en conséquence. Et ce, avec des applications variées, telles que la sécurité, l'environnement, la gestion de crise, de catastrophe naturelle, etc. Les postes respectifs que nous avons occupés dans des grandes entreprises nous ont permis de nous rendre compte que les bénéfices de cette technologie sont assez peu connus, en dehors de ces entreprises. Dès lors, nous nous sommes fixé l’objectif avec Prométhée de démocratiser l’observation de la Terre et de donner aux pays les moyens de protéger leur population, notamment les pays dits émergents, souvent évincés de cette offre. 

« Le gouvernement a annoncé la mise en place du programme France 2030, qui va consacrer 1,5 milliard d'euros au New Space » 

BM: Comment Prométhée répond à ces enjeux, concrètement ? 

G-M N: Nous avons fait le choix de nous concentrer sur deux types de verticales : l’intelligence stratégique (sécurité et défense) et l'intelligence environnementale. Notre approche de constellation va permettre à nos utilisateurs de recevoir les informations recueillies par les 20 nano satellites en très peu de temps, avec un rafraîchissement des données toutes les deux à trois heures. De plus, ces informations appartiennent à la fois au domaine du visible et de l’hyperspectral, c’est-à-dire que la technologie optique va permettre de caractériser la matière. Celle-ci sera capable de détecter, par exemple, que telle surface jaune est un champ mais plus encore, d’analyser si c’est une culture de blé ou de soja, s’il présente des signes de maladie, etc. Enfin, nous proposons une plateforme digitale via laquelle nos clients pourront accéder aux données brutes ou formatées sous forme de rapport graphique grâce à des algorithmes. C’est en somme une vraie offre de bout en bout où la technologie n’est plus une fin en soi, mais un moyen, et qui répond réellement aux besoins des utilisateurs finaux par le biais de données facilement accessibles et exploitables.  

BM: Le secteur du New Space est en pleine expansion au niveau mondial. La France a-t-elle un rôle significatif à jouer dans ce marché ? 

G-M N: Oui, clairement, et plusieurs faits encourageants le montrent. Si le nombre d’acteurs français dans le New Space ne cesse de croître, le gouvernement a également annoncé la mise en place du programme France 2030, qui va consacrer 1,5 milliard d'euros au New Space. Un montant significatif pour un secteur porté principalement par des start-up et des PME ! Cela incite de nombreux acteurs étrangers à venir s’installer en France ; au-delà de l’attrait économique, ces derniers sont intéressés par notre vivier de talents, notamment dans le domaine du numérique ou de l'ingénierie. La France va également accueillir cette année plusieurs événements majeurs pour le secteur, comme les Assises du New Space ou l’International Astronautical Congress – l’un des rendez-vous les plus importants pour le spatial. Tout cela laisse présager un bel avenir pour l'écosystème du New Space français. 

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