De We Love Green à Wonderland, de festival à tiers-lieu éphémère

Wonderland est un tiers-lieu éphémère gratuit imaginé par les équipes de We Love Green. Partie d’une feuille blanche, elles ont pu expérimenter et diversifier leur activité en imaginant un nouveau modèle économique. 

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Wonderland

A Porte de Vincennes, le long des voies ferrées de la petite ceinture, Wonderland, propose une parenthèse, pour se retrouver avec ses proches autour d’activités sportives, culturelles et gastronomiques, jusqu’au 3 octobre. Ce tiers-lieu hybride accueille aussi bien des amateurs de pétanque, skateboard, basketball et ping-pong que de simples curieux qui souhaitent profiter du cadre, ou assister à des événements culturels en dégustant des produits locaux préparés par des chefs en résidence.  

Construire et animer un lieu éphémère de cette ampleur, en pleine crise sanitaire, est un défi de tous les jours pour les équipes de We Love Green, habitués à organiser des événements musicaux et plus courts. « Wonderland est un gros projet qui nous a demandé beaucoup de bande passante, mais qui nous a donné les clefs d’un modèle économique qu’on ne connaissait pas », explique Marie Sabot, cofondatrice de We Love Green.  

L’opportunité d’ajouter une nouvelle corde à son arc 

En février 2020, la SNCF prend contact avec Marie Sabot et ses équipes pour leur proposer d’aménager un espace de 6 000 mètres carrés sur une emprise ferroviaire. A l’origine, la société des chemins de fer voulait louer le lieu pour un bail de 11 ans. Mais très vite, la crainte d’être aspiré par un tel projet aux dépens de leurs autres événements incite l’agence événementielle à proposer un autre modèle : un lieu éphémère hybride gratuit. « Nous sommes des fabricants de contenus éphémères. Là il s’agit de gérer l’économie d’un lieu. Ce sont deux métiers totalement différents ». Concevoir les décors, rédiger les fiches de postes des employés, établir un protocole d’accueil, gérer les ressources en énergie du lieu et les relations avec le voisinage… Partie de zéro, les équipes de We Love Green ont dû apprendre au fur et à mesure, dans un contexte de crise sanitaire.  

Initialement prévu en avril 2021, l’ouverture de Wonderland a finalement été reporté au 9 juin. Marie Sabot l’admet : « Ça a été très compliqué d’avril à juillet pour trouver le bon fonctionnement. Nous avons dû revoir toute l’organisation en interne. Les équipes qui ont conçu le lieu ne sont pas les mêmes qui le gèrent en ce moment ».  

Trouver le bon modèle économique a aussi été une tâche délicate. Les financeurs de Wonderland souhaitaient que l’entrée soit payante, mais pas les équipes de We Love Green. « Nous voulions un lieu ouvert à tous, avec plus d’inclusion sociale. C’est aussi un moyen pour nous d’atteindre de nouvelles cibles, comme les familles par exemple », indique Marie Sabot. Pour rentabiliser ce tiers-lieu éphémère à 2 millions d’euros, des événements BtoB y sont organisés. « On a un gros volet réceptif pour différents secteurs. On reçoit par exemple le lancement de la prochaine série Canal +, le séminaire de KissKissBankBank, le rassemblement politique de Julien Bayou... ». La partie bar de l'événement représente elle aussi une part significative du modèle économique. Wonderland perçoit aussi jusqu’à 20 % du chiffre d’affaires des restaurateurs sur place en échange de l’accueil. Dans l’ensemble, We Love Green n’a ni gagné ni perdu d’argent en façonnant ce tiers-lieu. Mais Marie Sabot l’assure : « L’expérience de cet événement nous a donné une nouvelle corde à notre arc. Si nous devions le refaire, ce serait plus facile. On le ferait autrement en optimisant certains coûts ». 

Wonderland infra
Toutes les infrastructures seront recyclées pour d'autres événements. (Crdt : Maxime Chermat)

 

Laboratoire de contenus 

Au-delà du skate-park, des terrains de basket, de pétanque et de ping-pong, Wonderland est un immense terrain de jeu. Différents stands de restauration y sont installés avec différents chefs qui prennent possession des lieux pendant une période. « Nous recevons aussi bien des chefs de renom comme Michel Sarran et son fameux croquemonsieur, que des jeunes restaurateurs qui viennent pour se faire connaître avant d’ouvrir leur restaurant », précise Marie Sabot. 

Cette approche expérimentale se retrouve aussi dans la programmation d’événements. Les plateformes de podcasts Binge Audio et Fréquence Moderne ont enregistré certaines émissions sur place, avec du public. « Pendant l’Euro de football, nous avons aussi fait un partenariat avec Konbini, où leurs humoristes commentaient les matchs en direct ». Cette approche originale et évolutive fait de Wonderland un laboratoire culturel. Ce lieu éphémère fermera d’ailleurs ses portes le 3 octobre prochain, le lendemain de la Nuit Blanche à Paris où il y aura de nombreux artistes et œuvres.  

Wonderland a permis aux équipes de We Love Green de s’exercer à un nouveau métier en découvrant la gestion d’un lieu. En apprenant sur le tas, l’agence événementielle s’est construit sa propre expertise. Elle est aujourd’hui capable de répondre à des demandes similaires pour des opérateurs. Mais Marie Sabot et ses équipes prévoient déjà de diversifier leurs activités autour de nouveaux projets, en région et centrés sur des activités touristiques. Affaire à suivre.