Backmarket, l’enjeu du reconditionnement à l’heure de la pollution numérique

Longtemps sous-estimée, la pollution créée par nos objets électroniques a pourtant une empreinte écologique non négligeable. Thibaud Hug de Larauze, PDG de Backmarket, explique comment son entreprise propose une alternative à la production incessante de nouveaux appareils numériques.

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Thibaud hug de Larauze

La production d’un smartphone neuf équivaut à 40 kilos d’émission de CO2 tandis qu’un smartphone reconditionné rejettera au maximum 10 kilos de CO2. Une donnée qui illustre l'impact, souvent sous-estimé, des appareils électroniques, tout comme le fait que 75 % des émissions de CO2 de l’industrie numérique vient de la création de nouveaux produits électroniques (smartphones, imprimantes, ordinateurs et autres).
Il y a 6 ans, Thibaud décide de créer une « boîte avec du sens ». L’idée du reconditionnement s’achemine à travers différentes rencontres. En sachant que les ressources de la planète sont limitées, l’entrepreneur a pour objectif de « faire mieux avec moins ». 

C'est le début de BackMarket, une plateforme de distribution qui rassemble sur son site des professionnels du reconditionnement pour les mettre en relation avec une clientèle souhaitant revendre ou acquérir des produits électroniques remis à neufs.

Une solution pour limiter le gaspillage numérique

La production de matériel numérique est toujours plus importante, les objets sont vendus neufs mais ils ne circulent pas. Pour le CEO, il y a deux façons d’affronter ce problème : « on demande au consommateur de moins acheter et de garder ses produits plus longtemps ».
Une solution idéale sur le papier mais utopique en réalité. Thibaud décide d’opter pour une option plus pragmatique : « en proposant des produits reconditionnés, l’achat de produits neufs sera moins important et la production de ces derniers sera plus faible ».
Ce changement de mentalité vis-à-vis de l’environnement métamorphose directement le mode de consommation des utilisateurs : « En 2014, seulement 2,5 % des acheteurs prétendaient se fournir chez nous pour limiter leur empreinte écologique, aujourd’hui ils sont 17 % » explique le PDG de BackMarket.

A la conquête du marché américain

Après une levée de fonds de plus de 100 millions d’euros cette année, l’ambition de Thibaud est de « devenir leader mondial » du reconditionnement électronique. La France reste le pays avec le volume de ventes le plus important mais le marché américain « grossit à une vitesse folle, il deviendra notre plus gros marché à terme ». Raisons principales : sa large population et son appétence pour les produits technologiques.
Pendant le confinement de mars dernier, les ventes d’appareils électroniques ont doublé : « l’ensemble de la population des marchés où on est ouvert, Europe et USA, était confinée, avec un besoin de communiquer pour télétravailler, étudier ou joindre ses proches ». Une situation qui entraîne un pic de demande dans les téléphones, tablettes, ordinateurs et mêmes consoles de jeux vidéo.
L’entrepreneur souhaite accélérer sa croissance aux USA grâce à deux étapes : la première est de fédérer les acteurs du reconditionnement autour de la plateforme. La deuxième est de renforcer la communication autour de BackMarket à travers le territoire américain.

Le challenge face à l’industrie du neuf

Le plus gros défi de BackMarket est de parvenir à concurrencer l’industrie du neuf, majoritairement responsable de l’empreinte environnementale numérique. Basée sur une économie linéaire, elle produit et distribue massivement pour tout recommencer par la suite.
A l’inverse, BackMarket crée de la circularité en réparant les produits, qui nécessitent des pièces détachées, souvent difficiles d’accès auprès des fabricants. Une mutation de business model profonde où « l’intérêt du consommateur n’est pas aligné avec celui des fabricants » estime l’entrepreneur.
L’industrie des produits électroniques neufs représente 1,3 trilliard de dollars à l’année. Celui du reconditionnement s’élève à 80 milliards, une part encore dérisoire qui représente seulement 6 % de la totalité du marché.
Sur le court terme, l’ambition est de retrouver pour les fêtes de fin d’année : « un maximum de produits reconditionnés sous le sapin plutôt que des produits neufs », espère le chef d’entreprise avec optimisme.