Le drone, petit objet pour grandes missions

La France fait partie des pionniers en matière de drones. Un avantage à préserver, alors que les usages professionnels se multiplient et laissent entrevoir leur potentiel en matière de transition écologique.

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De loin, on dirait un gros insecte survolant les vignes. À bien y regarder, on comprend qu’il s’agit d’un drone en plein travail d’épandage. « Nous avons mis au point ce système novateur à la demande d’un client devenu partenaire », explique Sylvain Navarro, CFO de Drone Volt. « Le drone passe juste au-dessus des vignes. Le mouvement des pales agite les feuilles et permet à la solution d’en couvrir les deux côtés. » À la clé, un sérieux gain écologique, puisque l’utilisation des drones pour l’épandage permet d’économiser jusqu’à 90 % d’eau, de pulvériser trois fois moins de produits phytosanitaires, le tout sans émettre de CO2. Ni, d’ailleurs, d’exposer d’être humain aux substances d’épandage au cours de l’opération.

Dans un monde où les entreprises sont de plus en plus attentives à leur empreinte carbone, l’utilisation du drone a le vent en poupe. « Evidemment, il permet d’améliorer les coûts de productivité. Mais ses atouts écologiques et le fait qu’il contribue à améliorer la sécurité du personnel en se substituant à l’homme pour des missions dangereuses jouent un rôle clé dans son adoption », confirme Sylvain Navarro. C’est ainsi que les « lignards », chargés d’inspecter les lignes électriques, se sont peu à peu reconvertis en télépilotes de drones. De quoi éviter de faire grimper des hommes en haut des pylônes ou d’envoyer un hélicoptère, chargé de 200 kilos de kérosène et nécessitant l’intervention de plusieurs personnes.

Du rêve à l’innovation

« Les nouvelles utilisations des drones sont souvent issues des demandes de nos clients », explique Sylvain Navarro. Les applications des drones intéressent tous les secteurs et l'Europe, notamment, planche sur les usages du futur. Innov’ATM est une entreprise créée il y a 8 ans. Spécialisée, au départ, dans la gestion du trafic aérien et des ressources aéroportuaires, elle s’est orientée vers la sécurisation des conditions de vol pour les drones. Elle coordonne le projet européen de R&D TindAIR, qui travaille sur leur intégration en milieu urbain, comme l’explique Stéphane Bascobert, co-fondateur et président d’Innov’ATM. « Notre rôle est de détecter, d’anticiper et de gérer les conflits de circulation qui peuvent surgir entre les drones et les autres usagers de l’espace aérien. Une condition indispensable pour développer les utilisations dans des zones denses et peuplées. Cela permettra d’ouvrir des usages nouveaux, comme la livraison de médicaments entre établissements hospitaliers, qui fera gagner un temps précieux pour le patient. » Une expérience grandeur nature sera déployée en 2022 à Bordeaux et Toulouse.

Une fois la circulation sécurisée, les usages du drone devraient se multiplier. « On pense évidemment au transport de marchandises, qui sera ainsi plus écologique et pourquoi pas, dans un futur plus lointain, au transport de personnes », explique Stéphane Bascobert. Pour cela, il faudra tout de même réunir quelques conditions techniques. « Il faut améliorer l’autonomie des drones et augmenter leur rayon d’action. Les évolutions viendront grâce au développement de nouveaux types de batteries, sans doute électriques, pourquoi pas à hydrogène. Le secteur travaille aussi sur le pilotage à distance », explique Sylvain Navarro.

Soutenir l’innovation française

Le secteur du drone demeure relativement jeune et morcelé. Conquérir de nouveaux clients demande également du temps – il ne faut pas négliger la période d’apprentissage, souligne Sylvain Navarro. Néanmoins, la France dispose de certains atouts. « Notre savoir-faire dans l’aéronautique est un avantage, poursuit le CFO de Drone Volt. La France a d’excellents sous-traitants, habitués à un niveau d’exigence élevé et à réaliser des productions en série avec zéro défaut. » Le milieu académique est également une force, que met en avant Stéphane Bascobert. « L’école Nationale de l’Aviation Civile a été précurseur au niveau mondial, en créant une Chaire drone. »  La différence, maintenant, va se jouer sur le déploiement à l’international. « Les entreprises américaines conquièrent de fortes parts de marché, parfois avec des produits de moindre qualité. La France concentre les écoles et les compétences technologiques. Désormais le secteur a besoin d’investissements pour ne pas se laisser distancer. »