Brésil, nouvelle terre promise de la tech pour les startups françaises ?

Du Nord au Sud, les Amériques ont de quoi attirer les entreprises de la tech. Avec une transition digitale bien enclenchée, le Brésil offre des perspectives nouvelles aux startups françaises. William Kunter, chief financial officer chez Swile, et Lana Ravel, responsable régionale Amérique latine & Caraïbes chez Bpifrance, reviennent sur les différentes raisons d’implanter sa start-up sur le pays.

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tech au bresil

La Silicon Valley n’est pas le seul eldorado de la tech en Amérique. Plus au sud, le Brésil émerge depuis quelques années comme une terre d’opportunités pour les entreprises de la tech qui souhaitent se développer à l’international. Parmi les startups qui tentent leur chance, on trouve la fintech Swile, le petit devenu géant des avantages employés en France. « Le marché français est très oligopolistique, possédé et contrôlé par trois ou quatre acteurs historiques. De prime abord, l'innovation et la digitalisation ne viennent pas forcément. C'est de cette façon que Loïc Soubeyrand, le fondateur et CEO de Swile, a eu l’idée de lancer une carte pour digitaliser les tickets restaurants », explique William Kunter, chief financial officer de l’entreprise, lors d’un atelier de Big le 6 octobre dernier. La société compte sur le rachat de son concurrent Bimpli pour devenir le leader français avec 35 % de marché et 4 millions de clients, mais aussi pour poursuivre son expansion à l’international. 

En Amérique latine, la transition digitale ouvre des portes pour la tech

Avec ce rachat, Swile compte accélérer son développement et notamment à l’international. La société souhaite notamment renforcer sa position sur le Brésil, plus gros marché mondial des avantages aux salariés qui représente 19 milliards d’euros. La France, deuxième sur le podium, n’atteint en comparaison « que » 7 milliards d’euros. « Beaucoup de scaleups ou de startups qui réfléchissent à une expansion internationale vont directement penser à l’énorme marché que représentent les Etats-Unis, très digital », souligne William Kunter. Pourtant, le Brésil propose aussi son lot d’opportunités sur ce même secteur. La fintech a progressé de 112 % entre 2018 et 2021 et « le Brésil se retrouve en tête dans le classement des pays comptant le plus de plateformes fintech » assure Lana Ravel, responsable régionale Amérique latine et Caraïbes chez Bpifrance. Cette situation favorable pour le numérique s’étend de manière plus générale à l’ensemble du continent sud-américain. « Les opportunités sont plus nombreuses dans la fintech en raison de la faible bancarisation d’une grande partie de la population. », précise-t-elle. « La zone bénéficie également d’une croissance exponentielle dans le retail et le e-commerce, et avec la transformation digitale du continent, la cybersécurité représente elle aussi un enjeu vital dans ce processus. » La région est, en effet, la troisième zone la plus touchée par les cyberattaques au monde. 

Profiter du réseau français, premier employeur étranger au Brésil, pour s’implanter

Pour se lancer au Brésil, Swile a choisi de passer par différents moyens. « Nous avons fait l'acquisition d'une start-up early stage, qui commençait à réfléchir à nos problématiques. Ça a été notre porte d'entrée sur le marché brésilien », confie le CFO de l’entreprise. Cette dernière s’entoure également de talents locaux, qui lui ont permis de réaliser une levée de fonds de 200 millions de dollars. « Le fonds qui a investi dans Swile n'était pas SoftBank International Londres mais SoftBank Latin America », raconte-t-il. « Notre démarche consistait à aller chercher des partenaires ayant une expérience du marché brésilien, qui connaissaient les acteurs historiques et qui pouvaient nous aider à nous implanter ». Premier employeur étranger au Brésil, le réseau français peut aussi aider à démarcher certains clients pour entrer sur le marché. L’élection du nouveau président Lula soulève tout de même des questionnements. « Beaucoup de choses peuvent changer et à ce stade, on retient beaucoup d’incertitudes sur les perspectives de croissance, la stabilisation de l'inflation et surtout sur l'évolution des prix des matières premières », relève Lana Ravel. Pour mieux connaître le terrain et sonder ces futures évolutions, William Kunter recommande de se rendre sur place et de se familiariser avec la culture locale. « C'est impossible d'établir sa startup sur place sans y aller de manière régulière. C’est en créant ce lien que l’on arrive à établir des discussions plus directes, même si cela prend beaucoup d’efforts ». 

La communication interculturelle au Brésil, un aspect à ne pas négliger

Le plan culturel n’est justement pas à négliger pour éviter les erreurs de traduction. Côté communication, « les Brésiliens ont tendance à enrober les choses. Il faut réussir à creuser, à établir un lien de confiance. Pour eux, les relations personnelles et la connaissance de l’interlocuteur sont d'une très grande importance ». Se rendre sur place prend alors d’autant plus de sens pour créer cette communication. Spécialiste des aspects financiers, William Kunter, directeur financier de Swile, confirme également que le pays présente une fiscalité particulièrement complexe, qui nécessite l’appui d’un bon fiscaliste. On estime que pour ses déclarations et tâches fiscales au cours d’une année, le Brésil nécessite en moyenne mille heures là ou une centaine sont suffisantes en France, au Royaume-Uni ou aux Etats-Unis, selon le CFO. Son dernier conseil ? « S'entourer et être accompagné pour aborder ce marché qui a la taille d'un continent. Le potentiel est énorme mais les défis également, à mesure que l'on passe d'un Etat à un autre. Il est donc essentiel de ne pas y aller seul ».